27.10.2014 Views

anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

toutefois, que dans cette minuscule chapelle, élevée paraît-il en 1652, l’année où l’abbé<br />

Fighiera fit don de la première statue miraculeuse (on en a ajouté d’autres depuis) – il ne s’y<br />

passe rien. Absolument rien. Puis, brusquement, coup sur coup, les prodiges se succèdent, les<br />

pèlerinages s’organisent (dès 1654 !) et la chapelle se transforme, s’agrandit, s’embellit. Et<br />

simultanément, des quantités d’ex-voto affluent de toutes parts. A tel point qu’un inventaire a<br />

dû être dressé déjà en juin 1663 par le chanoine Jean-Baptiste Torrini. Et cela continue…<br />

Même à l’heure qu’il est !...<br />

Ce sont donc des espèces d’offrandes votives que toutes les religions ont connues,<br />

l’antiquité païenne y compris. Chaque fois que l’homme a eu recours à la divinité, il s’est cru<br />

obligé de la remercier en déposant sur son autel un objet quelconque, symbolisant cet acte de<br />

foi. Dans la religion catholique, ce sont des scènes mêmes de ce miracle, peintes, sculptées ou<br />

brodées que l’on accrochait autour de la statue de la sainte ou du saint protecteur. Cela se<br />

faisait par l’intéressé lui-même ou bien par quelques artisans spécialisés dans ce genre de<br />

travail. Car faute de signature, on y reconnaît souvent la même écriture et le même style.<br />

Quand aux noms, hélas ! il n’y a guère que ceux des donateurs. Le peintre s’efface toujours<br />

devant celui qui le paye.<br />

C’est certainement l’une plus grandes collections de tableaux naïfs qui existent dans le<br />

monde. Comme quantité et comme qualité. Accrochés les uns sur les autres, du haut en bas,<br />

en plusieurs rangées, ces ex-voto font le tour complet de l’église ; dans une espèce de loggia à<br />

l’italienne, où le soleil d’été et la pluie et le vent d’hiver les abîment petit à petit. Inutile<br />

d’ajouter que parmi les ex-voto anciens qui se sont le mieux conservés, ce sont presque<br />

toujours les peintures sur verre dont le secret est perdu, sans doute, à tout jamais. Il y a là les<br />

guérisons miraculeuses : les chevaux qui se cabrent tout juste pour ne pas écraser une enfant<br />

tombée au milieu de la chaussée ; les collisions des navires ; la foudre qui tombe, mais qui ne<br />

frappe pas ; le plancher d’un bal qui s’effondre et les danseurs enlacés, suspendus dans le<br />

vide, indemnes, au-dessus de la cave béante ; le nourrisson qui roule tête en bas, tout le long<br />

d’une cage d’escalier, qui donne le vertige ; la montagne qui retient, on ne sait comment, sur<br />

son flanc abrupt et droit, un alpiniste imprudent ; le mécanicien d’un train, enfin, qui frôle un<br />

câble de haute tension, - car les ex-voto d’ici ne s’arrêtent pas au seuil de l’âge de la machine.<br />

La seule différence vraiment avec les autres arts populaires et purement manuels qui<br />

régressent immédiatement et irrémédiablement à son contact. Il y a les grands Bi et les<br />

voiturettes à pétrole ; les tricycles et les tricars ; les torpédos de course et les avions<br />

bimoteurs. Ils sont tout aussi nombreux que les antiques lits à colonnes et les lits à baldaquin,<br />

d’où la mort, la même mort, a pu être chassée, sinon écartée, un instant. Et partout, dans un<br />

170

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!