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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

d’argent et où les vermillons vifs et les rouges sang dominent. De même que les images<br />

allemandes, sombres, dures, trop appliquées, trop dessinées, disent aussitôt leur nom.<br />

Comme pour les dessins d’enfants, il est très difficile de déterminer la nationalité d’un<br />

tableau naïf. L’enfance n’a pas encore de patrie – force m’est de répéter cette lapalissade.<br />

Dans le domaine naïf, il y a eu un Guiraud de Saint-Chinian, un Français, qui a peint comme<br />

des miniaturistes persans et un Géorgien Niko Pirosman qui a laissé des tableaux qui auraient<br />

pu être signés Dupont ou Durand. Est-ce qu’il y a des indices vraiment sûrs d’une nationalité<br />

bien déterminée chez P.-E. Pajot, celui qui a fignolé ses marines et ses bateaux exactement<br />

comme l’aurait fait n’importe quel marin du monde ? Et qui ont, par-dessus le marché, un air<br />

vaguement japonais. Pour conclure, les naïfs n’ont pas de style, je l’ai déjà dit. Les naïfs<br />

n’imitent personne et c’est cela qui constitue le fait naïf. Le reste n’est que de la littérature, de<br />

la critique, ou de la poésie. De tout cela, un seul fait demeure patent, historique, sans doute, et<br />

on est obligé de l’admettre : fraîcheur et personnalité des naïfs. C’est tout et c’est assez, n’estce-pas<br />

? Ce n’est donc pas en conseillant de trouver un maître ou de passer par l’Académie<br />

des Beaux-Arts ou l’École libre d’un André Lhote, au pis aller, que l’on rendrait service aux<br />

naïfs. A nous non plus, d’ailleurs. Ce que l’époque veut, pour le moment, du moins, ce n’est<br />

guère un nouvel académisme, mais des yeux absolument neufs, des yeux vierges qui sauraient<br />

nommer – et bien entendu, pour la première fois – toutes les choses par leur nom. C’est d’eux<br />

qu’on attend cette Nouvelle Réalité qui saurait reprendre le contact réel et presque charnel<br />

avec l’homme et tout ce qui l’entoure.<br />

C’est pourquoi laissons donc peindre les naïfs librement, tranquillement. Laissons-les<br />

exposer, si cela leur convient. Cela ne gênera personne. Admirons ou n’admirons pas, mais<br />

regardons-les avec la plus grande attention, si possible, et tirons cette double leçon, sans doute<br />

salutaire, celle qui se dégage toute seule de toutes leurs œuvres où bat enfin un cœur humain :<br />

pureté et probité – choses plutôt rares, sinon exceptionnelles aux jours que nous vivons.<br />

Parmi tant d’autres expressions artistiques populaires disparues déjà, ou qui sont en train de<br />

disparaître sous nos yeux, il ne faut pas négliger, non plus, comme cela se fait d’habitude,<br />

hélas ! les « faiseurs » de bateaux ; et j’entends par là seulement tous ceux qui reproduisent<br />

les navires en miniature, mais aussi les peintres et les artisans d’occasion, des anciens marins<br />

pour la plupart, qui peignent les voiliers ou qui confectionnent ce que l’on appelle les demicoques<br />

et les bateaux en bouteille. Surtout ces derniers chez qui la plupart de l’interprétation<br />

personnelle est bien plus grande et qui relèvent, de ce fait, du véritable art populaire. Cet art<br />

est né avec la marine à voile et il est mort avec elle.<br />

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