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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

descendait tous ses tableaux naïfs, parmi les plus beaux, et que le monde entier enviait à la<br />

France, dans les caves. Transportés ensuite à Beaubourg, ils y sont encore…<br />

Pour en savoir un peu plus, pour essayer d’élucider comment on en est arrivé là, il faudrait<br />

maintenant revenir en arrière et examiner plus longuement ce qui s’est passé réellement dans<br />

ce domaine en France. Oh, ce n’est pas par quelque chauvinisme mal placé, loin de là, mais<br />

parce que tout est parti de ce pays, le meilleur et le pire : les premiers grands peintres naïfs<br />

connus, les premières expositions, les premiers articles dans la presse, les premiers livres, les<br />

premiers collectionneurs et les premiers marchands de tableaux – tout, jusqu’à l’idée même de<br />

la légitimité de cet art, y compris, hélas, cette incroyable désaffection à leur égard de ces<br />

dernières années.<br />

Parce que, en France aussi, il fut un temps où les premiers visiteurs du Salon des<br />

Indépendants, fondé en 1884, ne l’oublions pas, ne savaient que s’esclaffer devant les œuvres<br />

des peintres naïfs, Rousseau en tête, qu’ils regardaient en fait pour la première fois.<br />

Chez eux, tous les ciels sont bleus, les arbres verts et les pantalons garance, tout au moins<br />

c’est de cette façon-là que les définissait on ne sait plus quel critique d’art de cette époque. Ce<br />

disant, il voulait manifestement faire comprendre à ses lecteurs que les peintres naïfs se<br />

ressemblaient tous à l’image de ces énigmatiques Chinois ou, encore, de ces chats qui sont,<br />

comme chacun le sait, tous gris la nuit.<br />

Chats ou Chinois, il est plus que patent que les naïfs relevaient pour ces gens-là, dans<br />

l’opacité des brumes de ce siècle finissant, de la même uniformité. Du même flou ou tout<br />

comme. Autrement dit, faisant partie de certaines catégories des êtres et des choses que l’on<br />

ne connaît point ; pire, de celles que l’on ne veut pas connaître. Pour quelle raison ? Mettezvous<br />

à leur place. Pourquoi voudrait-on que l’on s’intéressât à ces parias, à ces vilains intrus,<br />

mal élevés en général, d’autant plus que profitant des libéralités de ce Salon très spécial – sans<br />

jury ni récompenses – ils osaient y montrer des tableaux absolument impensables ailleurs,<br />

tableaux grotesques, mal peints qui ne pouvaient que déranger le confort intellectuel de la<br />

critique pour laquelle le summum de la Beauté, avec un grand B, s.v.p. était, sans conteste,<br />

Bouguereau, William, idole posthume de Dali. Ça, c’était de le peinture, une peinture à ne pas<br />

y toucher, l’un des fleurons de l’autre salon, le seul, le grand, l’officiel, celui qui était<br />

inauguré tous les ans par le Président de la République en personne, avec son haut-de-forme<br />

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