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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

perpétuelle sagesse. Çà ne dure pas ? Çà passe ? Qu’importe ! Les épreuves photographiques<br />

numérotées et signées par l’artiste, perpétueront ces créations jusqu’à la fin des temps. Coût :<br />

de quatre mille à quinze mille dollars pièce.<br />

Il n’empêche que quelque chose me chiffonne quand même chez tous ces artistes lancés avec<br />

beaucoup d’intelligence et de talent par Pierre Restany, sous l’appellation de Nouveaux<br />

Réalistes, lors de leur exposition manifeste : Quarante degrés au-dessus de Dada, qui s’est<br />

tenue dans une galerie de la rue Montfaucon, face au marché couvert de Saint-Germain.<br />

Ca me chiffonne un peu, parce que si on gratte légèrement le millésime de la réalisation de la<br />

plupart de ces œuvres si révolutionnaires, un autre millésime transparaît en filigrane, une date<br />

à laquelle leurs auteurs n’étaient point nés, pas même leurs parents quelquefois, si ces<br />

géniteurs avaient conçus dans la fleur de l’âge.<br />

Ainsi, les emballages de Christo ont été trouvés par Man Ray lorsqu’il emballa de la même<br />

façon, il y a fort longtemps, une machine à coudre ; Marcel Duchamp a commis la première<br />

accumulation avec ses portemanteaux, qui étaient en même temps le premier mobile avant la<br />

lettre ; Man Ray a eu l’idée aussi d’utiliser un aimant, bien avant que Takis ne s’en empare,<br />

comme il a peint, le premier, son pain peint, chasse gardée depuis de Miralda, comme il a<br />

collé, toujours le premier, des tasses et des couverts sur une planchette, filon hôtelier de<br />

Spoerri. Puis, c’est encore Duchamp qui a jeté les bases des nouvelles mesures de l’espace<br />

avec ses mètres étalons, mais je ne vais tout de même pas vous expliquer ce que les enfants,<br />

dès l’école communale, connaissent désormais par cœur, à la place du catéchisme. Duchamp<br />

encore et toujours, le précurseur du Body Art, se faisant tonsurer et s’habillant en femme…<br />

Cette liste est longue, beaucoup trop longue pour que je puisse la citer en entier. Tous, tous,<br />

ils ont bâti leurs œuvres et leurs fortunes sur une idée fugace, sur une fantaisie occasionnelle,<br />

livrées en vrac, sans se soucier de leur postérité, mais récupérées, approfondies et exploitées à<br />

fond par eux des décades et des décades plus tard. Chacun la sienne. Cherchez, fouillez,<br />

grattez et vous trouverez à tous les coups les noms de Duchamp, de Man Ray et même de<br />

Picabia. On n’en sort pas. Or, le propre d’un génie n’était-il pas tout au moins jusqu’à ces<br />

derniers temps, de concevoir sa propre conception de l’art au lieu de s’engager dans les<br />

ornières tracées par leurs prédécesseurs lointains ?<br />

Tout s’est passé donc comme si ces actes de défi, jetés comme autant de gifles, comme autant<br />

de bombes au bon goût de leur époque, se sont mués en de véritables normes, codes et canons<br />

d’un art autre, institualisés par une société autre, – la nôtre – qui ne croit plus en rien et ne se<br />

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