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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

ils trébuchent néanmoins devant un mystère, devant une énigme d’autant plus révoltante, car<br />

ces simplets de naïfs arrivent aisément à des réussites plastiques autrement plus probantes que<br />

la plupart des peintres de métier, qui ont tout appris, mais qui ne peuvent rester que bouche<br />

bée et gros jean comme devant.<br />

Déjà, André Derain comparaît les tableaux naïfs à des coups de fusil tirés à bout portant, tant<br />

l’imprévu et la hardiesse de leurs trouvailles le laissait émerveillé. Il n’était pas le seul,<br />

d’ailleurs, à subir leur charme. D’autres et d’autres peintres, parmi les plus grands, savaient<br />

les apprécier tout autant.<br />

Vlaminck, Albert Marquet, Zadkine et Soffici les collectionnaient ; Robert Delaunay possède<br />

la « Charmeuse de Serpents » de Rousseau, qui est aujourd’hui au Louvre, et les deux seuls<br />

tableaux figuratifs qui étaient accrochés chez V. <strong>Kandinsky</strong>, dans son bel appartement<br />

parisien, donnant sur l’île de la Grande Jatte chantée jadis par Seurat, c’étaient encore les<br />

deux petits Rousseau. Rien d’étonnant de la part de celui qui a écrit avant la première guerre<br />

mondiale qu’il ne voyait, dans l’avenir, que la peinture abstraite et la peinture naïve !<br />

Picasso en posséda également plusieurs, mais tandis que les toiles de grand format ne<br />

quittaient pour ainsi dire jamais ses coffres bancaires, les deux petites, le portrait de la femme<br />

du Douanier et son auto-portrait, dit à la lampe à pétrole, le suivaient immanquablement<br />

partout, pendant ses multiples pérégrinations. Ses familiers les ont vus, et dans son<br />

appartement très bourgeois de la rue La Boëtie, et dans son immense atelier de la rue des<br />

Grands-Augustins, et dans sa villa de la Californie, au-dessus de Cannes. On ne peut que<br />

supposer, bien sûr, et supputer à perte de vue le sens de leur présence chez lui : était-ce ses<br />

dieux lares, ses fétiches, ses paratonnerres ou ses pierres de touche, un peu comme celles dont<br />

se servent les joailliers pour détecter s’il s’agit de l’or ou de quelque métal vil, empruntant<br />

seulement son apparence ?<br />

Les naïfs, orpailleurs et alchimistes à leur insu, possèdent, de toute évidence, ce don ou cette<br />

grâce de pouvoir transmuer tout en or, sans recourir pour cela à une science exacte<br />

quelconque.<br />

Il en résulte cette faculté étonnante, détonnante, de posséder un regard absolument neuf, tout<br />

en gardant la pureté et la fraîcheur des yeux les plus anciens de l’humanité. Les yeux des<br />

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