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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

génial de la couleur, de la couleur lumineuse et pure, amplification audacieuse des fresques<br />

romanes plutôt que de l’Impressionnisme ou du Cubisme. Les autres cubistes, par contre,<br />

professaient un ascétisme dogmatique de la couleur. A cet ascétisme de la parure<br />

correspondait un certain ascétisme des sujets. La pipe, la guitare, le paquet de tabac, le<br />

compotier, tel était le répertoire des formes. Ces objets étaient devenus, en quelque sorte,<br />

l’équivalent des sujets bibliques des anciens que l’on continuait cependant d’interroger. On<br />

méditait sur une guitare, comme on méditait autrefois sur un crâne. On méditait sur la<br />

structure des choses et sur la relativité de toute création terrestre. Les plus fanatiques allaient<br />

jusqu’à ajouter à leur tableau des objets réels, non peints, tels que les emballages d’un paquet<br />

de gris ou des morceaux de journaux, des ornements imprimés, pour ne pas imiter ce qui<br />

existait déjà. L’absolu, ou soi-disant, s’insurgeait contre les reflets du monde ambiant.<br />

À ce monde restreint, à ce monde moulé dans les cadres rigides d’une théorie<br />

purement cérébrale, André Lhote, avec son souriant optimisme, a toujours opposé l’amour de<br />

la vie, de tout ce qui existe pour le plaisir du cœur et de l’esprit.<br />

À l’époque héroïque du cubisme militant, lorsque ces chercheurs venus d’un peu<br />

partout se réunirent au « Salon de la Section d’Or », notre peintre ne voulut jamais renoncer ni<br />

à l’homme, ni au paysage, ni aux objets non encore catalogués par ses camarades de combat.<br />

Cette démarche si particulière, si agressive, lui valait à l’époque d’être, ainsi que<br />

Roger de la Fresnaye, tenu un peu en suspicion par les plus intolérants des théoriciens du<br />

cubisme. On voit aujourd’hui que ces deux peintres étaient parmi les plus profonds et les plus<br />

doués.<br />

Bien qu’il expose et continue d’exposer avec les cubistes au Salon de la Section d’Or<br />

– puis au Salon de la rue Tronchet ou au célèbre Salon des Indépendants – ceux-ci cependant<br />

ont peine à lui pardonner son indépendance et surtout l’article jugé trop élogieux de Jacques<br />

Rivière qui proposait André Lhote comme le mieux inspiré des cubistes. 2 Déjà à propos de<br />

son exposition particulière en 1910 à la Galerie Druet, notre peintre avait bénéficié d’une<br />

préface de Charles Morice, l’ami de Verlaine et de Gauguin. Ses autres protecteurs se<br />

nommaient André Gide, Marius et Ary Leblond, Maurice Denis et le substitut légendaire<br />

Joseph Granié, premier commentateur du cubisme. Pour punir leur confrère de ses succès, les<br />

théoriciens agissants du cubisme, Gleizes et Metzinger l’exclurent de leur livre. Jacques<br />

Villon et Roger de la Fresnaye partagèrent cette disgrâce, pour des raisons équivalentes,. On<br />

2 Voici en quels termes se terminait l’article de Jacques Rivière « Sur les tendances actuelles de la peinture<br />

(1911) » : « Enfin, je mettrai à part André Lhote dont les œuvres récentes me paraissent marquer avec une<br />

simplicité admirable l’avènement décisif de la peinture nouvelle. »<br />

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