12.04.2023 Views

La Grande Controverse

“Rejetons cet arrêté, dirent les princes ; dans les questions de conscience, la majorité n’a aucun pouvoir.” Protéger la liberté de conscience, voilà le devoir de l’Etat et la limite de son autorité en matière religieuse. Tout gouvernement civil qui, aujourd’hui, tente de régler ou d’imposer des observances religieuses abolit le principe pour lequel beaucoup des personnes ont si noblement combattu … “Les principes contenus dans cette célèbre Protestation... constituent l’essence même du protestantisme. Elle s’élève contre deux abus de l’homme dans les choses de la foi: l’intrusion du magistrat civil et l’autorité arbitraire du clergé. A la place de ces deux abus, le protestantisme établit, en face du magistrat, le pouvoir de la conscience … Les protestataires ne prétendaient pas seulement au droit de croire et de pratiquer leur foi, mais aussi à celui d’exprimer librement ce qu’ils estimaient être la vérité; et ils contestaient aux prêtres et aux magistrats le droit de les en priver. La protestation de Spire s’élevait solennellement contre l’intolérance religieuse et affirmait catégoriquement le droit de tout homme à servir Dieu selon sa conscience...

“Rejetons cet arrêté, dirent les princes ; dans les questions de conscience, la majorité n’a aucun pouvoir.” Protéger la liberté de conscience, voilà le devoir de l’Etat et la limite de son autorité en matière religieuse. Tout gouvernement civil qui, aujourd’hui, tente de régler ou d’imposer des observances religieuses abolit le principe pour lequel beaucoup des personnes ont si noblement combattu … “Les principes contenus dans cette célèbre Protestation... constituent l’essence même du protestantisme. Elle s’élève contre deux abus de l’homme dans les choses de la foi: l’intrusion du magistrat civil et l’autorité arbitraire du clergé. A la place de ces deux abus, le protestantisme établit, en face du magistrat, le pouvoir de la conscience … Les protestataires ne prétendaient pas seulement au droit de croire et de pratiquer leur foi, mais aussi à celui d’exprimer librement ce qu’ils estimaient être la vérité; et ils contestaient aux prêtres et aux magistrats le droit de les en priver. La protestation de Spire s’élevait solennellement contre l’intolérance religieuse et affirmait catégoriquement le droit de tout homme à servir Dieu selon sa conscience...

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

<strong>La</strong> <strong>Grande</strong> <strong>Controverse</strong><br />

étaient revêtus des armures royales se révélaient souvent plus droits et plus fermes que<br />

ceux qui portaient des soutanes et des mitres épiscopales. Louis de Berquin, d’une famille<br />

noble de l’Artois, était de ceux-là. Chevalier de la cour, cœur intrépide, gentilhomme<br />

doublé d’un savant, il était bon, affable et de mœurs irréprochables. " Il était, dit Crespin,<br />

grand sectateur des constitutions papistiques, grand auditeur des messes et des sermons,<br />

observateur des jeûnes et jours de fête. … <strong>La</strong> doctrine de Luther, alors bien nouvelle en<br />

France, lui était en extrême abomination. " Mais, providentiellement amené, comme tant<br />

d’autres, à l’étude des Ecritures, il fut stupéfait d’y trouver non les doctrines de Rome,<br />

mais celles de Luther. Dès ce moment, il fut entièrement acquis à la cause de l’Evangile.<br />

Tenu pour " le plus instruit des membres de la noblesse française " , favori du roi, il<br />

apparaissait à plusieurs, par son esprit, son éloquence, son indomptable courage, son zèle<br />

héroïque et son influence à la cour, comme le futur réformateur de son pays. " Aussi<br />

Théodore de Bèze dit-il que la France eût peut être trouvé en Berquin un autre Luther, si<br />

lui-même eût trouvé en François Ier un autre Electeur. " " Il est pire que Luther ", criaient<br />

les papistes. Et, en effet, il était plus redouté que lui par les romanistes de France.<br />

François Ier, inclinant alternativement vers Rome et vers la Réforme, tantôt tolérait,<br />

tantôt modérait le zèle violent des moines. Trois fois, Berquin fut emprisonné par les<br />

autorités papales et trois fois relâché par le roi qui, admirant sa noblesse de caractère et<br />

son génie, refusait de le sacrifier à la malignité de la hiérarchie. <strong>La</strong> lutte dura des années.<br />

Maintes fois, Berquin fut averti des dangers qu’il courait en France et pressé de suivre<br />

l’exemple de ceux qui étaient allés chercher la sécurité dans un exil volontaire. Le timide<br />

et opportuniste Erasme, qui, en dépit de toute sa science, ne réussit jamais à s’élever<br />

jusqu’à la grandeur morale qui tient moins à la vie et aux honneurs qu’à la vérité, lui<br />

écrivait : " Demandez une légation en pays étranger, voyagez en Allemagne. Vous<br />

connaissez Bède et ses pareils : c’est une hydre à mille têtes qui lance de tous côtés son<br />

venin. Vos adversaires s’appellent légion. Votre cause fût-elle meilleure que celle de<br />

Jésus-Christ, ils ne vous lâcheront pas qu’ils ne vous aient fait périr cruellement. Ne vous<br />

fiez pas trop à la protection du roi. Dans tous les cas, ne me compromettez pas avec la<br />

faculté de théologie." (G. de Félice, Histoire des Protestants de France (6e éd.), p. 33.)<br />

Mais le zèle de Louis de Berquin augmentait avec le danger. Loin d’adopter la<br />

politique prudente que lui conseillait Erasme, il eut recours à des mesures plus hardies<br />

encore. Non seulement il prêchait la vérité, mais il attaquait l’erreur. L’accusation<br />

d’hérésie que les romanistes lançaient contre lui, il la retournait contre eux. Ses<br />

adversaires les plus actifs et les plus violents étaient les savants et les moines de la<br />

Sorbonne, faculté de théologie de l’université de Paris, l’une des plus hautes autorités<br />

ecclésiastiques, non seulement de la ville, mais de la nation. Berquin tira des écrits de ces<br />

docteurs douze propositions qu’il déclara publiquement " contraires aux Ecritures et par<br />

conséquent hérétiques " ; et il demanda au roi de se faire juge de la polémique.<br />

137

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!