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Du stéréotype à la performance : les ... - Archipel - UQAM

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Coyote crée alors <strong>les</strong> êtres humains, mais ceux-ci, irrités par le fait qu'elle change constam­<br />

ment <strong>les</strong> règ<strong>les</strong> du jeu <strong>à</strong> son avantage, vont <strong>à</strong> leur tour vaquer <strong>à</strong> d'autres occupations. Afin de<br />

trouver de nouveaux partenaires pour une partie, ce sera, presque par inadvertance, Christo­<br />

phe Colomb et ses trois bateaux qu'elle fera apparaître. Les conquistadors ne veulent pas<br />

jouer au baseball mais plutôt capturer des Indiens pour <strong>les</strong> vendre. La trickster trouve cette<br />

idée si drôle que, tordue de rire, elle ne pose aucune action pour empêcher le désastre. À <strong>la</strong><br />

toute fin du récit, lorsqu'elle fera apparaître, toujours pour <strong>la</strong> même raison, Jacques Cartier et<br />

son équipage, <strong>la</strong> première chose qu'elle leur demande est: «Voulez-vous faire une partie?»<br />

À travers cette relecture subversive et humoristique de l'histoire, qui ridiculise ses<br />

«héros » européens et qui renverse le récit conventionnel de <strong>la</strong> « découverte » du Nouveau<br />

Monde, Thomas King offre un point de vue ironique quant <strong>à</strong> l'arrivée des Européens en<br />

Amérique. Cette fable nous dit que, n'eut été de l'insistante envie de <strong>la</strong> Coyote de jouer au<br />

baseball, <strong>la</strong>« découverte» du Nouveau Monde n'aurait sans doute pas eu lieu ... Réinventant<br />

<strong>la</strong> causalité historique de l'Amérique, Thomas King montre l'ampleur des pouvoirs créateurs<br />

du trickster (qui fait apparaître le monde, <strong>les</strong> animaux, <strong>les</strong> êtres humains), sa personnalité de<br />

joueur, <strong>à</strong> <strong>la</strong> fois dupeur et dupé, mais aussi son caractère amoral. Poser un jugement appar­<br />

tient non pas au trickster, mais <strong>à</strong> ceux et cel<strong>les</strong> <strong>à</strong> qui l'on raconte une histoire mettant en<br />

vedette ce personnage.<br />

Le trickster peut, selon <strong>les</strong> cultures, <strong>les</strong> récits et <strong>les</strong> œuvres, adopter différents traits de<br />

personnalité ou de comportement. Deanna Reder et Linda M. Morra, qui ont dirigé l'ouvrage<br />

Troubling Trickster: Revisioning Critical Conversations, soulignent d'ailleurs que, trop<br />

souvent, cette figure est perçue et étudiée de manière générique, sans tenir compte de sa<br />

provenance et de sa spécificité culturelle. Il n'y a pas, en effet, un seul et même trickster. Ce<br />

personnage possède des attributs différents, parfois divergents. Il s'inscrit dans un contexte<br />

culturel qu'on aurait tort, affinnent Reder et Morra (2010, p. vii-viii), de ne pas prendre en<br />

considération. Par exemple, l'étude pionnière de Paul Radin a pour objet le trickster tel qu'on<br />

le retrouve dans <strong>la</strong> nation winnebago, et non le « décepteur » en général. Puisqu'il constitue<br />

une figure malléable et versatile, on a tendance <strong>à</strong> utiliser le trickster, <strong>à</strong> l'instar de l'image de<br />

l'Indien, comme une métaphore. Pour Kristina Fagan (Reder et Morra, 2010, p. 6), « [s}uch<br />

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