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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

La remise en cause se fait sous la forme <strong>de</strong> parenthèses ou <strong>de</strong> tirets, ou d’une<br />

subordonnée conditionnelle : « Si l’on peur appeler hasard la chaîne <strong>de</strong>s événements qui<br />

dirigent la démarche <strong>de</strong> nos aspirations et <strong>de</strong> nos contraintes, le hasard m’amena un jour<br />

(…) » (EMM, 209), ou encore <strong>de</strong> tirets contenant une subordonnée conditionnelle : « - si<br />

c’était réellement un hasard – » (ACF, 165). <strong>Le</strong> glissement vers d’autres notions se fait par<br />

comparaison, l’utilisation par exemple du verbe ressembler : « Il n’est pas rare qu’un livre<br />

glissé sous nos yeux par un hasard qui ressemble à la Provi<strong>de</strong>nce (…) » (A, 83). <strong>Le</strong> mot<br />

« Provi<strong>de</strong>nce », employé avec majuscule glisse à son tour vers le mot « Destin » : « La<br />

Provi<strong>de</strong>nce – appelez ainsi si vous préférez le nom à la sévérité hautaine, inflexible et<br />

superbe du mot Destin – » (FTA, 189). Un certain nombre <strong>de</strong> mots, « Provi<strong>de</strong>nce »,<br />

« Destin », « <strong>de</strong>stinée », « fatalité » apparaissent alors interchangeables, et c’est en<br />

définitive la notion <strong>de</strong> <strong>de</strong>stin qui s’impose 327 .<br />

Cette idée <strong>de</strong> <strong>de</strong>stin suggère l’intervention <strong>de</strong> forces extérieures, <strong>de</strong> « puissances<br />

bienfaisantes ou <strong>de</strong>structrices, qui sont cachées <strong>dans</strong> le tissage <strong>de</strong> nos vies », la possibilité<br />

d’un « plan ordonné (…) par les dieux » (ACF, 100). L’être humain <strong>de</strong>vient l’instrument<br />

d’une <strong>de</strong>stinée à laquelle il lui faut bien se soumettre, livré aux calculs d’un<br />

« ordonnateur ». On notera une certaine diversité d’expressions lorsqu’il s’agit <strong>de</strong> désigner<br />

ces forces. Il s’agit, <strong>dans</strong> La Ville <strong>de</strong> sable, <strong>de</strong> « puissances en suspens » (VS, 33) ou <strong>de</strong><br />

« puissance surnaturelle » (VS, 161), <strong>dans</strong> De l’autre côté <strong>de</strong> la forêt <strong>de</strong> « gui<strong>de</strong> » (ACF,<br />

16), <strong>de</strong> « force toute-puissante » (ACF, 209), <strong>dans</strong> La Fête <strong>de</strong> la Tour <strong>de</strong>s Âmes <strong>de</strong><br />

« maîtres d’en bas » (FTA, 53), <strong>de</strong> « juges <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>stin » (FTA, 58), d’ « instances<br />

supérieures » (FTA, 241).<br />

Dans toute l’œuvre <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>, il existe une présence sous-jacente <strong>de</strong>s<br />

dieux, c'est-à-dire qu’il y a une circulation incessante entre l’en-<strong>de</strong>çà et l’au-<strong>de</strong>là, entre<br />

l’univers visible et l’univers invisible, comme <strong>dans</strong> l’œuvre du poète allemand Höl<strong>de</strong>rlin.<br />

Cette conception du cosmos apparaît <strong>dans</strong> l’épigraphe <strong>de</strong> Nous avons traversé la<br />

montagne :<br />

<strong>Le</strong>s lignes <strong>de</strong> la vie sont différentes, tels que vont les chemins, et telles les crêtes <strong>de</strong>s montagnes.<br />

Ici ce que nous sommes, un dieu là-bas peut le parfaire <strong>dans</strong> l’harmonie et la grâce éternelle et la<br />

paix. (NATM, 9)<br />

327 Quelques exemples, en particulier <strong>dans</strong> De l’autre côté <strong>de</strong> la forêt : « Nos trois rencontres étaient tout ce<br />

que le <strong>de</strong>stin avait bien voulu me concé<strong>de</strong>r » (ACF, 119) ; « Un soir, pourtant, au moment où ils allaient se<br />

séparer, comme <strong>de</strong> coutume, ils pensèrent ensemble, sans se l’être confié, que la nuit était trop belle et trop<br />

vaste pour que chacun reprît le chemin solitaire qui divisait leur <strong>de</strong>stin. » (ACF, 124) ; « Contrairement à leur<br />

habitu<strong>de</strong>, les oiseaux peints lui parurent immobiles et silencieux : effarouchés, attentifs, inquiets d’un danger<br />

qui les menaçait ou qui menaçait peut-être les hôtes <strong>de</strong> la maison, comme <strong>de</strong>s sentinelles aux avant-postes du<br />

<strong>de</strong>stin. » (ACF, 190)

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