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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

inventé <strong>de</strong>s démons hi<strong>de</strong>ux, le Charun au marteau, le Tuchulcha féroce, <strong>de</strong>s monstres et<br />

<strong>de</strong>s animaux composites qui trahissent une imagination dominée par le <strong>fantastique</strong> et le<br />

surnaturel 390 . Ces monstres sont présents <strong>dans</strong> la <strong>de</strong>meure d’Ermete :<br />

Il y avait aussi <strong>de</strong> petites urnes <strong>de</strong> tuf sur les panses <strong>de</strong>squelles s’ébattaient les démons <strong>de</strong> l’enfer<br />

étrusque, le démon Tuchulcha au gros nez bleu d’ivrognerie diabolique, coiffé <strong>de</strong> serpents, et son<br />

compère Charonte, manoeuvrant un merlin d’assommeur. (FTA, 20)<br />

Pour celui qui a le privilège <strong>de</strong> s’embarquer en compagnie du marquis, le passage<br />

signifie initiation. Ermete satisfait sa curiosité et fournit un enseignement. Ce rôle<br />

d’enseignant apparaît <strong>dans</strong> le choix <strong>de</strong>s verbes. Ermete « instruit », « enseigne »,<br />

« explique », « murmure » à l’oreille pour « informer », et le narrateur <strong>de</strong>vient élève,<br />

novice. Il apprend que les oiseaux se rendant à la Tour <strong>de</strong>s Âmes sont en réalité <strong>de</strong>s âmes<br />

en peine, qu’une seule nuit <strong>de</strong> l’année leur est réservée, et il découvre le sens sacré que<br />

prend la fête <strong>dans</strong> sa dimension nocturne. <strong>Le</strong> carnaval prend en effet un aspect plus<br />

mystérieux à la faveur <strong>de</strong> la nuit, alors que les âmes en peine se réunissent pour venir<br />

écouter une messe <strong>de</strong>s morts dirigée <strong>dans</strong> une église par le virtuose Bastianelli.<br />

<strong>Le</strong> carnaval prend une gran<strong>de</strong> importance <strong>dans</strong> les romans <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>. Dans<br />

<strong>de</strong>s romans tels que <strong>Le</strong>s Vaines Montagnes, Algues, L’Ombre d’un arbre mort, il<br />

représente une interruption <strong>de</strong> la vie habituelle, permet un retour à l’antique, et se situe<br />

tout naturellement <strong>dans</strong> une mythologie du passage. <strong>Le</strong> carnaval raconté par Barnward, au<br />

moment où les amis sont réunis <strong>dans</strong> la villa Crespi, au chapitre XVII <strong>de</strong>s Vaines<br />

Montagnes est une fête durant laquelle se trouve célébrée la « fin <strong>de</strong> l’Hiver et le retour <strong>de</strong><br />

la « Belle Saison », la « venue du Roi Printemps » (VM, 189). Ce carnaval est le symbole<br />

d’une victoire saisonnière. Il possè<strong>de</strong> un vieux fond religieux et sacré, confirmé par<br />

l’utilisation <strong>de</strong>s majuscules. Il s’agit d’une fête très ancienne, païenne, mettant en jeu <strong>de</strong><br />

vieilles divinités que le Christianisme n’a pas pu exorciser. Pour Barnward, le carnaval<br />

permet la rencontre avec les masques utilisés pour fêter la déroute <strong>de</strong> l’hiver. Ces masques<br />

sont effrayants parce qu’ils remettent en question la personnalité <strong>de</strong> l’individu, posent le<br />

problème <strong>de</strong> la dualité <strong>de</strong> la personne, et mettent en doute « la substance du réel » (VM,<br />

193). <strong>Le</strong>s masques permettent <strong>de</strong> se libérer <strong>de</strong> la personnalité habituelle, <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir une<br />

autre figure inconnue, oubliée, tapie <strong>dans</strong> les ténèbres <strong>de</strong> l’inconscient. <strong>Le</strong> carnaval auquel<br />

assistent Terence Fingal et Georgiana <strong>dans</strong> L’Ombre d’un arbre mort est un carnaval<br />

390 Voir à ce sujet <strong>Le</strong>s secrets du passé, encyclopédie <strong>de</strong> la civilisation, publiée sous la direction <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong><br />

<strong>Brion</strong>, Londres, Thames et Hudson, 1975, l’article <strong>de</strong> Donald Strong « <strong>Le</strong> problème étrusque », p.225 : « <strong>Le</strong>s<br />

terrifiants démons, Charun et Tuchulka, <strong>de</strong> la « tombe d’Orcus », caveau d’une famille aristocratique <strong>de</strong><br />

Tarquinia, figurent parmi les êtres infernaux que l’on rencontre <strong>de</strong> plus en plus souvent <strong>dans</strong> les <strong>de</strong>rnières<br />

peintures. La cruauté et le <strong>de</strong>sespoir, et même la terreur <strong>de</strong> la vie future, dominent <strong>dans</strong> un grand nombre <strong>de</strong><br />

scènes peintes »

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