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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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grand songe. <strong>Le</strong> mon<strong>de</strong> ainsi baigné paraît nouveau, surprenant, plus primitif, associé au<br />

cycle vie-mort-renaissance. L’éclairage contribue à nous faire entrer <strong>dans</strong> un contexte<br />

mythologique et initiatique.<br />

2. L’aube et le crépuscule.<br />

tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

La scénographie personnelle <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> s’articule autour <strong>de</strong> quatre<br />

moments principaux : la nuit, l’aube, le crépuscule et l’heure <strong>de</strong> midi. Plus que la nuit en<br />

elle-même, ce qui importe, ce sont les moments <strong>de</strong> lisière. La nuit nous rapproche<br />

d’Hoffmann et <strong>de</strong> Novalis, du « <strong>fantastique</strong> baroque <strong>de</strong>s « caprices à la manière <strong>de</strong><br />

Callot » 618 , l’aube <strong>de</strong>s Chants <strong>de</strong> l’aube <strong>de</strong> Robert Schumann où les « mystères terribles <strong>de</strong><br />

la nuit » sont « rachetés enfin par les pressentiments du jour qui vient » 619 .<br />

L’aube, nous l’avons vu à propos <strong>de</strong> La Fête <strong>de</strong> la Tour <strong>de</strong>s Âmes, représente le<br />

moment du retour <strong>dans</strong> le réel et l’univers rationnel. Elle est porteuse d’un temps à venir<br />

sur lequel s’ouvre la fin du roman. Nous retrouvons ce thème <strong>dans</strong> bien <strong>de</strong>s romans. Tantôt<br />

l’aube est évoquée <strong>dans</strong> l’ouverture, <strong>dans</strong> <strong>Le</strong> Caprice espagnol, La Ville <strong>de</strong> sable, tantôt<br />

elle renouvelle les énergies, <strong>dans</strong> L’Ermite au masque <strong>de</strong> miroir ou Nous avons traversé la<br />

montagne.<br />

Dans L’Ermite au masque <strong>de</strong> miroir, l’aube correspond, <strong>de</strong> manière traditionnelle<br />

à une nouvelle enfance, à une « jeunesse » qui incite au mouvement (EMM, 84). C’est un<br />

instant chargé <strong>de</strong> poésie où la nature s’éveillant à nouveau « encourage à vivre » (EMM,<br />

133). Pour le voyageur infatigable du Caprice espagnol, c’est un « élément d’exotisme »<br />

inséparable <strong>de</strong> ses multiples pérégrinations (CE, 7). Pour les explorateurs <strong>de</strong> Nous avons<br />

traversé la montagne, ce moment fait l’objet d’une véritable expérience, comme nous le<br />

montrent ces <strong>de</strong>ux textes :<br />

<strong>Le</strong> petit jour ressemblait à une pointe <strong>de</strong> cristal <strong>de</strong> roche où se dissolvent les <strong>de</strong>rniers brouillards<br />

fumeux <strong>de</strong>s ténèbres <strong>de</strong>vant l’assaut aigu <strong>de</strong>s couleurs du prisme. C’était ainsi que s’offrait à nous<br />

chaque neuve journée, les mains ouvertes, le visage lavé <strong>de</strong> frais, avec une bonne o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong><br />

propreté et d’avenir. (NATM, 195)<br />

(…) le premier coup <strong>de</strong> fouet du vent sur le visage quand nous ouvrions notre tente nous restituait<br />

aussitôt le bonheur <strong>de</strong> vivre et <strong>de</strong> croire à l’efficacité <strong>de</strong> notre vie. L’aube avait une teinte <strong>de</strong> rose<br />

et d’argent qui nous rafraîchissait et nous exaltait. L’atmosphère <strong>de</strong> la tente, épaissie par la<br />

puanteur <strong>de</strong> nos rêves, nous chassait au-<strong>de</strong>hors et les premiers pas que nous faisions, titubant d’un<br />

618 <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>, Schumann et l’âme romantique, op. cit., p.372.<br />

619 Ibid., p.374.

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