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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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– Vous le savez bien : <strong>de</strong>rrière <strong>de</strong>s écrans. (ACF, 161)<br />

<strong>Le</strong> miroir est écran, frontière indécise et franchissable entre le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s vivants<br />

et celui <strong>de</strong> l’au-<strong>de</strong>là. Il fait tomber le réel <strong>dans</strong> l’indéterminé <strong>de</strong>s songes, et donne au songe<br />

la dimension du réel.<br />

403<br />

2. « Des flâneries insidieuses ».<br />

tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

Il en est du tableau comme du miroir, mais avec toutefois une différence : le<br />

miroir ne laisse rien <strong>de</strong>viner <strong>de</strong> ce qu’il dissimule. <strong>Le</strong> tableau donne à voir un espace à<br />

priori fictif. Dans le <strong>fantastique</strong>, cet univers fictif est traité comme un décor qui accè<strong>de</strong> à la<br />

réalité. Il offre, comme le dit le narrateur <strong>de</strong> Château d’ombres, <strong>de</strong>s « complicités <strong>de</strong><br />

fuite » et accueille le ou les personnages :<br />

Je me sentais attiré surtout par les tableaux et les miroirs, – je ne sais pourquoi. <strong>Le</strong>s miroirs,<br />

supposais-je, gardaient toujours quelque chose <strong>de</strong>s êtres qui s’y étaient rencontrés eux-mêmes.<br />

<strong>Le</strong>s tableaux aussi : les paysages surtout, car, entre eux et nous, se conjurent souvent <strong>de</strong>s<br />

complicités <strong>de</strong> fuite. (CO, 173)<br />

Aux tableaux, ceux par exemple que découvre le narrateur du Journal du visiteur,<br />

il faut ajouter les fresques et les tapisseries <strong>de</strong> Château d’ombres, les pièces <strong>de</strong> <strong>de</strong>ntelle <strong>de</strong><br />

La Rose <strong>de</strong> cire, les scènes peintes sur une horloge <strong>de</strong> L’Ombre d’un arbre mort, les<br />

meubles peints, les écrans <strong>de</strong> soie <strong>de</strong> De l’autre côté <strong>de</strong> la forêt et <strong>de</strong>s Vaines Montagnes.<br />

Ces objets envoient un message, un signe, aiguisent la tentation <strong>de</strong> l’ailleurs.<br />

<strong>Le</strong> narrateur du Journal du visiteur explore les chambres du second étage <strong>de</strong> la<br />

maison où il s’est installé, et découvre un amas <strong>de</strong> tableaux, <strong>dans</strong> un cabinet baroque<br />

recouvert <strong>de</strong> « nombreux petits miroirs » qui entretiennent une « sorte d’agréable vertige »<br />

(JV, 27), parmi lesquels se trouvent un portrait et une nature morte. Il s’agit d’un panneau<br />

ancien qui révèle, « <strong>dans</strong> le <strong>de</strong>mi-jour d’un intérieur hollandais d’autrefois (…) une <strong>de</strong> ces<br />

compositions moralisatrices et déprimantes que l’on appelait alors, d’un nom tristement<br />

justifié, <strong>de</strong>s « vanités » (JV, 45). Ces « vanités » rappellent l’époque baroque, et sa volonté<br />

d’exprimer une pensée mélancolique axée sur la mort et le sentiment du néant. La vanité<br />

possè<strong>de</strong> un côté didactique. <strong>Le</strong>s objets qui la composent se réfèrent à une idée d’ensemble :<br />

le temps passe, la mort frappe inéluctablement les choses et les hommes, la matière connaît<br />

aussi l’usure et la <strong>de</strong>struction. L’instrument <strong>de</strong> musique ne joue plus, le fruit est rongé par<br />

le ver, les fleurs sont sur le déclin, le verre est renversé ou brisé. La vanité transmet une<br />

allégorie <strong>de</strong> la mort, un memento mori. <strong>Le</strong> phénomène <strong>de</strong> la nature morte, dit <strong>Marcel</strong>

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