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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

court <strong>dans</strong> les tissus <strong>de</strong> la matière et que par conséquent chaque chose est digne d’attention<br />

et d’affection. Ils pensent aussi que l’univers est une gran<strong>de</strong> étoffe comparable à un tapis<br />

<strong>de</strong>rrière lequel tous les fils se rejoignent. Si une déchirure se produit en un endroit<br />

quelconque, le désordre et la <strong>de</strong>struction suivent. Il est donc indispensable que les hommes<br />

entretiennent cette étoffe avec soin, par la force <strong>de</strong> leur amitié, <strong>de</strong> leur compassion, <strong>de</strong> leur<br />

amour, qu’ils <strong>de</strong>meurent en état <strong>de</strong> communion fraternelle avec l’ensemble <strong>de</strong> la Création.<br />

Dans toute l’œuvre <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>, on trouvera trace <strong>de</strong> ces idées. <strong>Le</strong>s<br />

personnages <strong>de</strong> Nous avons traversé la montagne, mêlant leur <strong>de</strong>stins, sont par exemple<br />

liés aux étoiles : « Nous jugeons plus pru<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> marcher la nuit, afin <strong>de</strong> nous couvrir<br />

d’un manteau d’invisibilité, et <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong> l’amitié <strong>de</strong> quelques étoiles » (NATM, 57).<br />

<strong>Le</strong> narrateur découvre qu’il a une certaine parenté avec le mon<strong>de</strong> qui l’entoure et tous les<br />

éléments qui le composent présentent les mêmes caractéristiques que les êtres vivants. Un<br />

lézard par exemple contemple « la beauté <strong>de</strong> l’univers », médite « sur la suprême<br />

excellence du Dieu » qui l’a créé et révèle au narrateur ce que peut être la beauté du désert.<br />

« <strong>Le</strong>s chevaux s’ébrouent <strong>dans</strong> la nuit ; parfois l’un d’eux hennit et s’agite en rêve »<br />

(NATM, 225) ; « Parfois les bêtes remuaient et grognaient en rêvant » (VS, 9). <strong>Le</strong> lac, <strong>dans</strong><br />

L’Ombre d’un arbre mort, « ensommeillé <strong>dans</strong> sa ceinture <strong>de</strong> forêt, remuait encore ses<br />

songes <strong>de</strong> la nuit et jouait paresseusement avec les reflets <strong>de</strong>s grands sapins qui avaient<br />

bercé ses rêves » (OAM, 140). <strong>Le</strong>s arbres <strong>de</strong> Château d’ombres sont atteints d’une<br />

inquiétante maladie… Nous pourrions ainsi accumuler les exemples où l’on retrouverait<br />

les mêmes effets <strong>de</strong> personnification qui n’ont pas uniquement une fonction esthétique<br />

mais nous font entrer <strong>dans</strong> un système du mon<strong>de</strong>. Certains animaux, en particulier les<br />

oiseaux ou le cheval sont en lien avec d’autres mon<strong>de</strong>s. Ils peuvent à leur manière<br />

intervenir <strong>dans</strong> le <strong>de</strong>stin <strong>de</strong>s humains, ou simplement les observer, et proposer un regard<br />

inversé :<br />

<strong>Le</strong> berger dort, <strong>de</strong>hors, sur un rectangle <strong>de</strong> feutre, humé par les bêtes qui s’étonnent <strong>de</strong> l’étrange<br />

galop <strong>de</strong>s rêves <strong>de</strong>s hommes, et pour lesquelles toutes ces bizarres aventures du sommeil qu’elles<br />

ne déchiffrent pas ressemblent aux ri<strong>de</strong>s inégales que le grand vent trace sur la neige molle, aux<br />

friselis <strong>de</strong>s creux d’eau à l’écart du torrent, aux veinures mystérieuses <strong>de</strong>s roches rongées <strong>de</strong> gel.<br />

(NATM, 231)<br />

De la même manière, une gran<strong>de</strong> place est donnée aux objets 169 . « <strong>Le</strong>s objets ont<br />

leur secret. <strong>Le</strong>s êtres aussi. » Telles sont les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières phrases <strong>de</strong> La Rose <strong>de</strong> cire. <strong>Le</strong>s<br />

169 <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> avait un amour particulier pour les objets. En témoignent les entretiens avec Pierre Lhoste,<br />

ainsi que l’entretien qui se trouve <strong>dans</strong> une <strong>de</strong>s éditions <strong>de</strong> L’Enchanteur, Paris, Albin Michel, Bibliothèque<br />

du club <strong>de</strong> la femme, 1965, p.12 : « <strong>Le</strong>s objets sont <strong>de</strong>s êtres vivants ; d’une vie secrète qui ne se révèle qu’à

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