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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

appartiennent à une « famille » spirituelle qui évolue <strong>dans</strong> un temps et un espace<br />

<strong>fantastique</strong>s.<br />

Dans Nous avons traversé la montagne, les personnages sont liés par un projet<br />

commun. Ils ont <strong>de</strong>s « <strong>de</strong>stins épars », mais dès le début <strong>de</strong> l’histoire, nous savons « qu’il<br />

n’y aura plus, désormais, qu’une seule aventure pour eux tous, mêlant leurs <strong>de</strong>stins comme<br />

on fait bourse commune » (NATM, 16). <strong>Le</strong>urs conceptions <strong>de</strong>s choses ont changé. Nous<br />

entrons là <strong>dans</strong> l’aspect philosophique <strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>. Dans un premier temps<br />

archéologues ou historien <strong>de</strong>s religions ayant une approche scientifique <strong>de</strong>s choses, ils<br />

<strong>de</strong>viennent poètes et aventuriers se livrant au hasard du voyage, se lancent sur <strong>de</strong>s<br />

« chemins ignorés », commencent une « immense queste » à la recherche d’eux-mêmes, et<br />

ont du mon<strong>de</strong> une perception différente. C’est le cas surtout <strong>de</strong> Berg et du narrateur<br />

davantage tournés vers le mystère et le surnaturel. Une profon<strong>de</strong> amitié les unit et cette<br />

conviction que leurs <strong>de</strong>stins sont profondément impliqués les uns <strong>dans</strong> les autres. Cette<br />

« vision <strong>de</strong> l’univers », pour reprendre l’expression <strong>de</strong> Dilthey, est à rapprocher <strong>de</strong> celle<br />

<strong>de</strong>s « Fils <strong>de</strong>s Étoiles », thématique, fil qui traverse l’ensemble <strong>de</strong> l’œuvre <strong>romanesque</strong>.<br />

Il s’agit d’une sorte <strong>de</strong> société secrète qui apparaît <strong>dans</strong> La Ville <strong>de</strong> sable, <strong>Le</strong><br />

Château <strong>de</strong> la princesse Ilse et L’Ermite au masque <strong>de</strong> miroir, comparable <strong>dans</strong> une<br />

certaine mesure à la « Turmgesellschaft », la Société <strong>de</strong> la Tour présentée par Goethe <strong>dans</strong><br />

le Wilhelm Meister. Goethe raconte <strong>dans</strong> ce roman les aventures d’un jeune homme, le<br />

développement et l’enrichissement <strong>de</strong> sa personnalité à l’occasion <strong>de</strong>s événements et <strong>de</strong>s<br />

rencontres. Wilhelm rejoint la Société <strong>de</strong> la Tour où il lui sera possible <strong>de</strong> mettre en<br />

pratique ses propres aptitu<strong>de</strong>s et d’œuvrer pour le bien collectif. Parvenu au sein <strong>de</strong> cette<br />

société, il se débarrasse <strong>de</strong> ses illusions et <strong>de</strong> ses erreurs et s’ouvre aux vérités du mon<strong>de</strong> :<br />

Emporté <strong>dans</strong> ce mouvement cosmique dont il est inséparable, parce qu’il est aussi nécessaire au<br />

cosmos que le cosmos lui est nécessaire à lui-même, et c’est la suprême gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la vie d’être<br />

ce tissu <strong>de</strong> nécessités, comme l’enseigne Goethe. L’individu découvre ainsi sa complète<br />

responsabilité qui est d’accomplir sa <strong>de</strong>stinée individuelle et en même temps la <strong>de</strong>stinée cosmique<br />

<strong>dans</strong> laquelle celle-ci est impliquée. 168<br />

<strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> esquisse les grands traits d’une communauté énigmatique et<br />

complexe <strong>dans</strong> laquelle les gens les plus humbles côtoient les princes et les savants. <strong>Le</strong>s<br />

« Fils <strong>de</strong>s Étoiles » viennent <strong>de</strong> pays différents et appartiennent à <strong>de</strong>s époques différentes,<br />

se réunissent parfois et se livrent à <strong>de</strong>s cérémonies, à <strong>de</strong>s fêtes solsticiales durant<br />

lesquelles, au crépuscule, ils saluent la venue <strong>de</strong>s étoiles. Pour eux seul compte le mérite<br />

que chacun met au service du cosmos. Ils sont convaincus que la vie est partout, qu’elle<br />

168 <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>, L’Allemagne romantique, le voyage initiatique, tome 2, op. cit., p.129-130.

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