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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

d’imagination, mais celle-ci est à prendre <strong>dans</strong> un autre sens : il s’agit <strong>de</strong> ce tracé profond<br />

qui met l’être humain en relation avec lui-même et aussi avec quelque chose qui dépasse<br />

sa propre personne.<br />

<strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> affirme l’existence d’un <strong>fantastique</strong> « authentique ». Ce <strong>fantastique</strong><br />

est lié à une expérience. Lorsqu’il s’exprime sur le <strong>fantastique</strong>, <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> insiste<br />

beaucoup sur ce qui est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> la chose vécue. Dans l’entretien accordé à Andréa<br />

Turquetit, reviennent <strong>de</strong>s expressions telles que : « J’ai plusieurs fois senti une présence<br />

aimable et sympathique. Il y a quelques années, à Venise (…) », « <strong>Le</strong> <strong>fantastique</strong> <strong>de</strong> mes<br />

romans m’est dicté par ces fantômes que je rencontre et que je n’invente pas (…) », « La<br />

première fois que cela m’est arrivé, j’étais à Amsterdam pour étudier les peintres<br />

hollandais. Je me promenais <strong>dans</strong> un musée (…) » 692 . <strong>Le</strong> mot expérience a une gran<strong>de</strong><br />

importance. Il trouve son équivalent <strong>dans</strong> le mot allemand Erlebnis, mot difficile à traduire<br />

en français parce qu’il représente à la fois une qualité et une intensité. L’expérience dont il<br />

est question ici n’est pas une opération objective. <strong>Le</strong> terme indique que l’on quitte le<br />

domaine <strong>de</strong> l’objectivité pour entrer <strong>dans</strong> la vie du sujet lui-même. On, pourrait parler au<br />

mieux d’expérience vécue 693 .<br />

La première partie <strong>de</strong> notre étu<strong>de</strong> a permis <strong>de</strong> montrer que le <strong>fantastique</strong> brionien<br />

a pour but <strong>de</strong> révéler « d’autres dimensions du réel » 694 , l’autre face <strong>de</strong> ce que nous<br />

appelons le réel, l’une et l’autre face étant imbriquées l’une <strong>dans</strong> l’autre. Cela a <strong>de</strong>s<br />

conséquences pour le lecteur qui est amené à remettre en question la conception habituelle<br />

qu’il a du réel et, à l’image du héros, à se mettre en quête <strong>de</strong>s faces cachées du mon<strong>de</strong>. <strong>Le</strong><br />

but est <strong>de</strong> montrer que « le <strong>fantastique</strong> est partout » et que « tout est <strong>fantastique</strong> (…). J’ai<br />

toujours eu la conviction que chaque chose contient une âme <strong>de</strong> fantôme » 695 . <strong>Marcel</strong><br />

<strong>Brion</strong> se situe <strong>dans</strong> le sillage <strong>de</strong>s romantiques allemands pour qui « tout est réel jusqu’à un<br />

certain point », ce qui veut dire que les tentatives <strong>de</strong> différenciation entre réel et irréel<br />

<strong>de</strong>meurent fragiles et discutables 696 . Il se situe aussi <strong>dans</strong> le prolongement <strong>de</strong> Nodier et <strong>de</strong><br />

Nerval pour qui, dit <strong>Marcel</strong> Schnei<strong>de</strong>r, « le <strong>fantastique</strong> existe en lui-même (…) c’est une<br />

substance, comme dirait saint Thomas, ou encore une catégorie au sens que Kant donne à<br />

ce mot. L’œuvre <strong>de</strong> Hoffmann (…) leur sert <strong>de</strong> référence et <strong>de</strong> caution » 697 .<br />

692 « <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> », entretien par Andréa Turquetit, Miroir du <strong>fantastique</strong>, op. cit., p.175-176.<br />

693 <strong>Le</strong> mot « erleben » est cité <strong>dans</strong> L’Allemagne romantique, le voyage initiatique, tome 1, p.119. Erleben<br />

signifie « d’abord éprouver, vivre quelque chose ».<br />

694 <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>, Suite <strong>fantastique</strong>, op. cit, p.78.<br />

695 « <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> », entretien par Andréa Turquetit, Miroir du <strong>fantastique</strong>, op. cit., p.174.<br />

696 La phrase <strong>de</strong> Ludwig Tieck est citée <strong>dans</strong> L’Allemagne romantique, le voyage initiatique, tome 1, op.<br />

cit., p.245.<br />

697 <strong>Marcel</strong> Schnei<strong>de</strong>r, Discours du <strong>fantastique</strong>, op. cit., p.11-12.

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