27.12.2013 Views

Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

290<br />

B. LE RÊVE.<br />

1. Rêve et labyrinthe. « L’inextricable écheveau <strong>de</strong>s rêves ».<br />

tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

On ne peut manquer d’être frappé, à la lecture <strong>de</strong>s romans <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>, par<br />

l’importance que prennent les rêves. Ils contribuent à emmener le lecteur <strong>dans</strong> un véritable<br />

labyrinthe intérieur. « <strong>Le</strong> rêve n’est pas en soi <strong>fantastique</strong> ni même surnaturel », dit Jean<br />

Fabre, parce que le rêve en lui-même ne représente pas une rupture avec la norme 481 . Il<br />

possè<strong>de</strong> un statut bien délimité <strong>de</strong> jardin <strong>de</strong> l’inconscient. Pour qu’il y ait <strong>fantastique</strong>, il<br />

faut qu’il vienne habiter la réalité, qu’il y ait interférence, que le rêve vienne contaminer le<br />

réel et le réel le rêve. <strong>Le</strong> rêve <strong>de</strong>vient réalité, et la réalité <strong>de</strong>vient rêve.<br />

Un rêve peut très bien figurer <strong>dans</strong> un roman réaliste. Il est <strong>dans</strong> ce cas intégré au<br />

psychisme du rêveur, i<strong>de</strong>ntifié comme tel, c'est-à-dire comme songe, vision ou encore<br />

hallucination du personnage, et représente <strong>dans</strong> le récit une phase insolite. Il n’a pas<br />

d’inci<strong>de</strong>nce sur l’image du mon<strong>de</strong> communiquée par le récit. Sa fonction est explicative : il<br />

ai<strong>de</strong> le lecteur à comprendre le héros, à le connaître plus profondément. Dans le récit<br />

<strong>fantastique</strong>, il a une autre fonction.<br />

Nous pouvons constater qu’il existe <strong>de</strong>s liens soli<strong>de</strong>s, historiques entre <strong>fantastique</strong><br />

et rêve. <strong>Le</strong> <strong>fantastique</strong> littéraire naît à une époque où l’on s’intéresse beaucoup au rêve.<br />

Nous l’avons vu : le <strong>fantastique</strong> est le territoire d’une opposition entre <strong>de</strong>ux conceptions du<br />

réel. À propos du rêve, <strong>de</strong>ux mo<strong>de</strong>s d’approche s’opposent à la fin du XVIII e siècle. D’une<br />

part une perspective rationaliste et cartésienne qui est celle <strong>de</strong>s philosophes <strong>de</strong>s Lumières,<br />

ainsi que le confirme Jean-Daniel Gollut :<br />

Pour la majorité <strong>de</strong>s esprits du XVIII e siècle, la manifestation onirique reste encore<br />

essentiellement un assemblage d’idées hétéroclites, un mélange d’images sans raison ni<br />

signification, et la représentation qu’on en donne souligne surtout une bizarrerie qui n’est pas<br />

censée couvrir ou déguiser une vérité <strong>de</strong> sentiment ou <strong>de</strong> pensée 482 .<br />

À l’opposé, nous enseigne Albert Béguin, se trouvent les romantiques qui<br />

« admettent tous que la vie obscure est en incessante communication avec une autre réalité,<br />

plus vaste, antérieure et supérieure à la vie individuelle ». <strong>Le</strong> romantisme recherche <strong>dans</strong><br />

les images du rêve le chemin qui conduit aux régions ignorées <strong>de</strong> l’être pour y trouver « le<br />

secret <strong>de</strong> tout ce qui, <strong>dans</strong> le temps et <strong>dans</strong> l’espace, nous prolonge au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> nous-mêmes<br />

481 Jean Fabre, <strong>Le</strong> miroir <strong>de</strong> sorcière, op. cit.,p. 124.<br />

482 Jean-Daniel Gollut, Conter les rêves, op. cit., p.27.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!