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Le fantastique dans l'oeuvre romanesque de Marcel Brion

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tel-00699768, version 1 - 21 May 2012<br />

<strong>de</strong>s « entrailles <strong>de</strong> la terre » 437 . La découverte d’une pierre donne l’occasion <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

fêtes parmi les peupla<strong>de</strong>s locales. <strong>Le</strong>s voyageurs arrivent au moment où on a pêché un<br />

poisson qui tient <strong>dans</strong> sa gueule une pierre sacrée.<br />

Un long dialogue avec les pierres venues <strong>de</strong>s profon<strong>de</strong>urs se poursuit <strong>dans</strong> toute<br />

l’œuvre <strong>romanesque</strong> <strong>de</strong> <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong>. « Je me suis toujours lié d’amitié avec les<br />

cailloux », dit Beatus Muller <strong>dans</strong> L’Ermite au masque <strong>de</strong> miroir, et cette amitié concerne<br />

les pierres « tout à fait ordinaires », et aussi « l’aristocratie <strong>de</strong>s agates et <strong>de</strong>s cristaux »<br />

(EMM, 203). Cette relation se poursuit <strong>dans</strong> l’artisanat. Kalkeidos <strong>dans</strong> La Ville <strong>de</strong> sable,<br />

le père Costelet <strong>dans</strong> La Rose <strong>de</strong> cire interviennent sur la matière. Il est nécessaire que<br />

l’homme révèle le métal à lui-même, qu’il ai<strong>de</strong> à la réalisation <strong>de</strong> sa vocation. En donnant<br />

à l’objet une forme qu’il a conçue <strong>dans</strong> un usage pratique précis, il noue une sorte <strong>de</strong><br />

complicité entre la matière et lui, une affection profon<strong>de</strong>. Il pose le problème <strong>de</strong>s<br />

métamorphoses possibles <strong>de</strong> la matière, et ne fait que poursuivre et accélérer un<br />

mouvement commencé au sein <strong>de</strong> la nature matricielle.<br />

Beatus Muller est un amateur <strong>de</strong> cavernes, un « collectionneur <strong>de</strong> grottes »<br />

(EMM, 86). Il est :<br />

L’explorateur qui parcourt les régions souterraines aussi familièrement qu’on se promène <strong>dans</strong> les<br />

rues <strong>de</strong> sa ville natale ou les chambres <strong>de</strong> la vieille maison familiale ! Qui a découvert cent<br />

labyrinthes nouveaux <strong>dans</strong> les Mammoth-Caves et ramé sur tous les lacs <strong>de</strong>s abîmes d’Auvergne !<br />

(EMM, 169)<br />

Persuadé que le <strong>de</strong>ssin <strong>de</strong>s enfers « en fait un labyrinthe dont un voyage durant<br />

éternellement ne permettrait pas <strong>de</strong> sortir » (EMM, 90), il raconte qu’enfant il a rencontré<br />

<strong>dans</strong> une grotte un ermite qui lui a livré <strong>de</strong>s paroles oraculaires :<br />

Représentez-vous, mon enfant, la terre, à la surface <strong>de</strong> laquelle nous nous trouvons, traversée au<strong>de</strong>ssous<br />

<strong>de</strong> haut en bas et d’un point cardinal à l’ autre, par autant <strong>de</strong> sentiers, <strong>de</strong> chemins, <strong>de</strong><br />

routes, <strong>de</strong> voies <strong>de</strong> toutes sortes, pareils à ceux qui courent sur le sol. Avec autant <strong>de</strong> carrefours,<br />

d’entrecroisements, <strong>de</strong> nœuds serpentins, et pour tout éclairage le noir total qui empêcherait <strong>de</strong><br />

voir les poteaux indicateurs, s’il y en avait. (EMM, 93)<br />

C’est <strong>dans</strong> ce type <strong>de</strong> labyrinthe souterrain que pénètre Sir John <strong>dans</strong> La Fête <strong>de</strong><br />

la Tour <strong>de</strong>s Âmes. Il raconte comment il est amené à pénétrer <strong>dans</strong> le royaume <strong>de</strong>s enfers<br />

pour aller y chercher la jeune fille dont il est épris. Descendant <strong>dans</strong> ces espaces intérieurs,<br />

il se situe <strong>dans</strong> le sillage d’Orphée.<br />

<strong>Le</strong> labyrinthe inférieur apparaît d’abord comme un mon<strong>de</strong> séparé <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s<br />

vivants, mais explorable. <strong>Marcel</strong> <strong>Brion</strong> reprend la vieille tradition selon laquelle les <strong>de</strong>ux<br />

437 L’expression apparaît plusieurs fois <strong>dans</strong> L’Ermite au masque <strong>de</strong> miroir, p.172 et 208.

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