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Comptes rendus des cours et conférences de l'EHESS 2004-2005

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CR Enseignement 04-05 16/02/06 15:32 Page 194<br />

194 ANNUAIRE <strong>2004</strong>-<strong>2005</strong><br />

<strong>de</strong>uxième vol<strong>et</strong> <strong>de</strong> notre enquête. L’analyse d’anecdotes tirées <strong><strong>de</strong>s</strong> « Notes au<br />

fil du pinceau » ( b i j i ), principalement le Yi j i a n z h i écrit au X I I e siècle, a révélé que<br />

les hang ne jouent pas <strong>de</strong> rôle particulier dans les réalités sociétales auxquelles<br />

s ’ i n t é res sent les auteurs. La lecture a permis <strong>de</strong> passer en revue plusieurs<br />

p o i n t s : l’impossibilité d’utiliser la notion <strong>de</strong> travail pour caractériser l’activité<br />

d’un homme entre p renant ou plus généralement d’un homme <strong>de</strong> bien ; le lien<br />

o rganique entre la réputation <strong>et</strong> la confiance, entre la qualité <strong><strong>de</strong>s</strong> hommes <strong>et</strong> la<br />

valeur <strong><strong>de</strong>s</strong> affaires ; le rôle <strong>de</strong> la religion, en particulier <strong>de</strong> la croyance à la «rétribution<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> actes » (bao), dans la construction sociale <strong><strong>de</strong>s</strong> i<strong>de</strong>ntités <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> réputations,<br />

soumises à l’enchaînement <strong><strong>de</strong>s</strong> conduites dans le double sens du<br />

terme, à savoir l’interdépendance <strong><strong>de</strong>s</strong> actes <strong>et</strong> l’impossibilité d’échapper à ces<br />

liens. Ces analyses recoupent celles qui ont été conduites sur les re p r é s e n t ations<br />

du commerce dans les sociétés <strong><strong>de</strong>s</strong> pério<strong><strong>de</strong>s</strong> postérieures, ce qui nous a<br />

conduit, pour finir, à centrer notre travail sur une lecture régressive <strong>de</strong> ces travaux<br />

<strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> sources. En tirant les groupements professionnels du côté <strong>de</strong> l’affermage<br />

<strong>de</strong> l’impôt <strong>et</strong> <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’État, plusieurs étu<strong><strong>de</strong>s</strong> américaines<br />

sur les époques mongole <strong>et</strong> mandchoue ont repris la problématique <strong><strong>de</strong>s</strong> « l i t u rgies<br />

» weberiennes pour expliquer les compromis passés par l’État prémo<strong>de</strong>rne,<br />

largement agricole, avec les marchands ; ces espaces <strong>de</strong> négociation apparaissent<br />

comme une nouvelle arène politique dans laquelle plusieurs suj<strong>et</strong>s collectifs<br />

s’aff rontent, <strong>de</strong> la bureaucratie aux communautés locales en passant<br />

précisément par les organisations marchan<strong><strong>de</strong>s</strong>. Il est utile pourtant <strong>de</strong> se<br />

d é m a rquer <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te approche en termes <strong>de</strong> « l i t u rg i e s » : 1 ) dans la mesure où<br />

les activités <strong><strong>de</strong>s</strong> marchands <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> artisans créent d’autres espaces <strong>de</strong> négociations<br />

– au sein <strong>de</strong> leurs propres associations, avec leurs fournisseurs <strong>et</strong> leurs<br />

clients –, leurs activités ne sont « l i t u rg i q u e s » que du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’État ; 2 )<br />

l’i<strong>de</strong>ntité, les intérêts <strong><strong>de</strong>s</strong> marchands se construisent plus largement à travers<br />

les obligations qu’ils assument dans tous les espaces collectifs où ils sont engagés,<br />

sous forme <strong>de</strong> se<strong>cours</strong>, <strong>de</strong> dotations aux temples, <strong>et</strong>c. ; 3 ) ces engagements<br />

m<strong>et</strong>tent en évi<strong>de</strong>nce <strong><strong>de</strong>s</strong> diff é rences, <strong><strong>de</strong>s</strong> contradictions en rappelant<br />

que les groupements professionnels n’étaient pas socialement homogènes. La<br />

caractérisation sociale <strong><strong>de</strong>s</strong> marchands <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> artisans <strong>de</strong>vient donc centrale<br />

dans un mon<strong>de</strong> urbain où le luxe débridé <strong>et</strong> l’extravagance apparaissent comme<br />

l’indice <strong>de</strong> la liberté du commerce <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’artisanat, face à <strong><strong>de</strong>s</strong> autorités peu soucieuses<br />

<strong>de</strong> contrôler ces activités ou incapables <strong>de</strong> résister à la <strong><strong>de</strong>s</strong>truction <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

anciennes solidarités. Des travaux récents, comme ceux <strong>de</strong> Richard von Glahn<br />

pour la Chine mongole <strong>et</strong> <strong>de</strong> Timothy Brook pour la Chine <strong><strong>de</strong>s</strong> Ming, s’y<br />

emploient en partant <strong>de</strong> textes qui soulignent la consommation en milieu urbain.<br />

La lecture <strong>de</strong> ces travaux <strong>et</strong> <strong>de</strong> plusieurs sources nous a amené à reposer la<br />

question <strong><strong>de</strong>s</strong> relations entre commerce <strong>et</strong> bureaucratie à partir <strong>de</strong> la catégorie<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> « r i c h e s ». Si celle-ci se trouve mobilisée <strong>de</strong> façon contradictoire par certains<br />

auteurs <strong><strong>de</strong>s</strong> Song lors <strong><strong>de</strong>s</strong> réformes <strong>de</strong> la fin du XI e siècle, tous s’accor<strong>de</strong>nt<br />

sur l’idée que c<strong>et</strong>te catégorie constitue une réserve <strong>de</strong> richesse pour l’administration<br />

comme pour la population. La lutte autour <strong><strong>de</strong>s</strong> réformes aurait ainsi stimulé<br />

la réflexion sur la production <strong><strong>de</strong>s</strong> richesses <strong>et</strong> ouvert la voie à l’émergence<br />

<strong>de</strong> nouveaux rapports entre administration <strong>et</strong> marchands sous les Song du Sud.

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