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Comptes rendus des cours et conférences de l'EHESS 2004-2005

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CR Enseignement 04-05 16/02/06 15:34 Page 505<br />

SIGNES, FORMES, REPRÉSENTATIONS 505<br />

L’interprétation littéraire. Théories <strong>et</strong> pratiques<br />

Pierre Jud<strong>et</strong> <strong>de</strong> La Combe, directeur d’étu<strong><strong>de</strong>s</strong><br />

Poésies <strong>et</strong> philosophies : interprétations <strong>de</strong> la tragédie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la comédie<br />

grecques<br />

LA question du séminaire était : quel type <strong>de</strong> connaissance apporte l’interprétation<br />

philologique d’un texte poétique, par rapport aux interprétations historiennes,<br />

philosophiques ou liées aux sciences sociales ? C<strong>et</strong>te question ne se<br />

laisse pas résoudre par une simple réflexion sur la métho<strong>de</strong>, comme si nous<br />

avions aff a i re à une relation suj<strong>et</strong>/obj<strong>et</strong>, puisque les textes poétiques, ou certains<br />

d’entre eux, développent une perspective critique (subjective) sur leur relation<br />

à la philosophie, à la langue ou à ce qui est dit <strong>de</strong> leur contexte historique.<br />

En prétendant compre n d re les eff<strong>et</strong>s structurants pour les textes que pro d u i t<br />

c<strong>et</strong>te critique, la philologie doit d’abord tenter <strong>de</strong> re c o n s t r u i re la logique <strong>de</strong> ce<br />

débat interne aux textes. L’accent a été mis sur la confrontation entre poésie <strong>et</strong><br />

philosophie, par l’étu<strong>de</strong> d’œuvres <strong>de</strong> la tragédie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la comédie grecques. La<br />

tragédie pose, en eff<strong>et</strong>, par son action, qui est close (mythique en ce sens),<br />

rationnelle (selon le principe <strong>de</strong> causalité) <strong>et</strong> qui relève toujours d’une forme <strong>de</strong><br />

théodicée, une thèse <strong>de</strong> type théorique sur le <strong>de</strong>venir humain, construit selon<br />

les schémas <strong><strong>de</strong>s</strong> cosmologies contemporaines. Le paradoxe est que c<strong>et</strong>te<br />

thèse spéculative, qui est par nature discursive, est toujours tue (ou aff i r m é e<br />

marginalement, en début ou en fin <strong>de</strong> drame chez Euripi<strong>de</strong> ou dans le Philoctète<br />

<strong>de</strong> Sophocle, présenté par C. Hémard), alors que les dis<strong>cours</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> personnages<br />

ne sont jamais en mesure <strong>de</strong> dire le sens <strong>de</strong> l’action représentée. L’ é v é n e m e n t<br />

scénique a été redéfini à partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te tension (en rupture avec la tradition<br />

ouverte par la P o é t i q u e, présentée par L. I r r i b a ren). Nous sommes partis <strong>de</strong> la<br />

seule pièce conservée qui échappe à c<strong>et</strong>te forme, l’A n t i g o n e <strong>de</strong> Sophocle, où<br />

l’action n’est pas déclenchée par les dieux, pour examiner les mo<strong><strong>de</strong>s</strong> par lesquels<br />

le drame parvient à renaturaliser (avec l’idée <strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>tin) la décision initiale<br />

du roi. La comparaison avec Les sept contre Thèbes d’Eschyle, puis L e s<br />

P h é n i c i e n n e s d’Euripi<strong>de</strong> <strong>et</strong> enfin la fin « p o s t i c h e », mais d’école eschyléenne,<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> Sept, a permis <strong>de</strong> voir comment l’expérimentation tentée dans l’Antigone a<br />

pu être analysée au Ve siècle.<br />

Pour la comédie, après avoir reconstruit l’antinomie qui traverse la critique<br />

m o d e rne à partir <strong><strong>de</strong>s</strong> positions du jeune Hegel (la comédie comme expre s s i o n<br />

<strong>de</strong> la « s u b s t a n c e » qu’est la cité) <strong>et</strong> <strong>de</strong> Fr. Schlegel (avec l’accent sur la fantaisie),<br />

nous avons tenté <strong>de</strong> dégager les principes compositonnels du genre dans<br />

son opposition à la tragédie, avec un « ordre <strong><strong>de</strong>s</strong> choses » qui n’est pas reconstruit<br />

théoriquement, mais donné (la réalité du moment), <strong>et</strong> une discontinuité discursive<br />

comme succession <strong>de</strong> négations <strong>de</strong> c<strong>et</strong> ord re connu (lecture du début<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> Acharniens <strong>et</strong> <strong>de</strong> la fin <strong><strong>de</strong>s</strong> Grenouilles d’Aristophane).<br />

Il s’agissait alors <strong>de</strong> dégager les conditions langagières <strong>de</strong> ces orientations<br />

d i ff é rentes <strong><strong>de</strong>s</strong> genres, ce qui nous a amenés à distinguer <strong>et</strong> à évaluer, à l’intérieur<br />

même <strong>de</strong> la philologie, les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> diff é rentes philosophies du langage,<br />

selon qu’elles fon<strong>de</strong>nt la validité <strong>de</strong> la communication sur la référence (la tro i-

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