24.06.2013 Views

Comptes rendus des cours et conférences de l'EHESS 2004-2005

Comptes rendus des cours et conférences de l'EHESS 2004-2005

Comptes rendus des cours et conférences de l'EHESS 2004-2005

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

CR Enseignement 04-05 16/02/06 15:32 Page 279<br />

HISTOIRE 279<br />

Pouvoir, droit <strong>et</strong> société dans l’Antiquité romaine<br />

Yann Rivière, maître <strong>de</strong> <strong>conférences</strong><br />

A N A LY S E <strong>de</strong> la documentation relative à « l ’ i n t e rdiction <strong>de</strong> l’eau <strong>et</strong> du feu » a<br />

L’ constitué le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> nos re c h e rches sur l’exil à Rome. Le sens<br />

précis <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te formule aqua(e) <strong>et</strong> igni(s) interdictio, parfois complétée d’un troisième<br />

terme, « l ’ i n t e rdiction du toit » (cf. Appien, Fragment <strong>de</strong> Ve n a f r o…), n’est<br />

g u è re éclairé par les auteurs anciens <strong>et</strong> c’est avec pru<strong>de</strong>nce qu’il faut abord e r<br />

les interprétations symboliques qu’ils nous ont transmises. Néanmoins, une<br />

attention particulière peut être accordée à quelques lignes <strong>de</strong> Verrius Flaccus<br />

(cf. Festus, L, 3) qui opposent « l ’ i n t e rd i c t i o n » touchant l’exilé à la « r é c e p t i o n »<br />

<strong>de</strong> l’eau <strong>et</strong> du feu par l’épouse le jour du mariage ou qui évoquent encore leur<br />

utilisation dans un rite <strong>de</strong> purification consécutif à la participation à <strong><strong>de</strong>s</strong> funérailles.<br />

L’eau <strong>et</strong> le feu auraient aussi été employés à l’occasion d’autres rituels<br />

tels que l’accomplissement d’un traité (cf. Servius). Dans chacune <strong>de</strong> ces situations,<br />

la mobilisation <strong>de</strong> ces éléments constitue un marqueur <strong>de</strong> séparation ou<br />

<strong>de</strong> franchissement d’une limite. Au commencement du I I I e siècle ap. J .-C., la<br />

l e c t u re « h u m a n i s t e » que propose Lactance <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pro c é d u re d’exil révolue<br />

est bien sûr le refl<strong>et</strong> d’une réflexion chrétienne, bien éloignée <strong>de</strong> l’institution<br />

d’origine. Elle s’inscrit pourtant dans la tradition <strong>de</strong> commentaires plus anciens<br />

soulignant les garanties offertes au prévenu dans une cause capitale <strong>de</strong>vant<br />

l’assemblée du peuple : la possibilité aurait été accordée à l’accusé, en <strong>cours</strong><br />

d’instance, <strong>de</strong> gagner une autre cité pour échapper à une exécution (Polybe,<br />

C i c é ron). Cependant, les procès politiques exclusivement mentionnés par les<br />

s o u rces ne sauraient illustrer le fonctionnement courant <strong>de</strong> l’exercice <strong>de</strong> la justice<br />

criminelle dans la Rome républicaine. Une liste <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>tinations connues a<br />

été ébauchée. L’enquête s’est poursuivie par une lecture <strong><strong>de</strong>s</strong> épiso<strong><strong>de</strong>s</strong> légend<br />

a i res (le meurtre du roi Tatius) ou historiques m<strong>et</strong>tant en scène une pro c é d u re<br />

d’aqua <strong>et</strong> igni interdictio. Mommsen paraît s’être mépris à son suj<strong>et</strong> en la considérant<br />

comme une mesure dirigée à l’origine exclusivement contre les étrangers<br />

à la cité, puis contre <strong><strong>de</strong>s</strong> citoyens déchus. Les liens <strong>de</strong> filiation supposés<br />

entre la désignation <strong>de</strong> l’homo sacer <strong>et</strong> l’interdictio ou encore la parenté établie<br />

par les juristes <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong> la République entre c<strong>et</strong>te dégradation civique <strong>et</strong> la<br />

livraison d’un citoyen à l’ennemi ( d e d i t i o ) ont ensuite été examinés à la lumière<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> travaux <strong>de</strong> Roberto Fiori (1996).<br />

Sans que soit refermé le précé<strong>de</strong>nt dossier, un saut chronologique a été<br />

accompli au commencement du second semestre : l’enquête s’est orientée vers<br />

les formes d’exil existantes à l’époque impériale. Les réformes d’Auguste <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

T i b è re rapportées par Dion Cassius ont été détaillées, tandis qu’une lecture du<br />

D i g e s t e a permis <strong>de</strong> dresser un tableau <strong>de</strong> la peine <strong>de</strong> re l e g a t i o au <strong>cours</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

t rois siècles suivants. Contrairement au condamné à la d e p o r t a t i o qui subissait<br />

une perte du droit <strong>de</strong> cité (capitis <strong>de</strong>minutio), le relégué conservait en principe<br />

son patrimoine <strong>et</strong>, en dépit <strong>de</strong> l’éloignement géographique, toutes ses attaches<br />

à sa cité d’origine (représentation en justice, accomplissement d’actes d’évergétisme,<br />

capacité testamentaire…). Une telle sanction touchait principalement

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!