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Comptes rendus des cours et conférences de l'EHESS 2004-2005

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CR Enseignement 04-05 16/02/06 15:34 Page 507<br />

SIGNES, FORMES, REPRÉSENTATIONS 507<br />

Le <strong>de</strong>uxième niveau d’analyse pourrait correspondre à une approche sociographique<br />

<strong>et</strong> sociologique <strong><strong>de</strong>s</strong> actes d’écriture. C’est celui du digraphisme.<br />

Sous ce terme nous rangeons l’ensemble <strong><strong>de</strong>s</strong> phénomènes <strong>de</strong> coexistence <strong>de</strong><br />

formes graphiques au sein d’une société. Il s’agit aussi bien <strong>de</strong> la coexistence<br />

souvent concurrentielle, <strong>de</strong> systèmes d’écriture (en Chine, au Vi<strong>et</strong>nam par ex.)<br />

ou d’alphab<strong>et</strong>s (écriture latine, arabe <strong>et</strong> locale en Afrique, écriture traditionnelle<br />

v s é c r i t u re cyrillique en Mongolie) que d’allographes ou <strong>de</strong> polices <strong>de</strong> caractères<br />

à l’intérieur d’une même écriture. Les travaux historiques d’A. P<strong>et</strong>rucci sur<br />

les écritures d’apparat <strong>et</strong> les conflits entre normes graphiques dans les villes<br />

italiennes servent ici <strong>de</strong> référence. On peut partir <strong>de</strong> l’hypothèse que tout acte<br />

d ’ é c r i t u re s’inscrit dans une sorte <strong>de</strong> digraphie générale impliquant côtoiement<br />

<strong>de</strong> normes, création d’écarts, <strong>de</strong> variations <strong>et</strong> <strong>de</strong> formes transgressives, répression<br />

<strong>et</strong> police <strong><strong>de</strong>s</strong> pratiques graphiques. L’intervention d’Éloi Ficqu<strong>et</strong> sur la<br />

situation en Éthiopie nous a convaincus <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> croiser les données<br />

historiques, politiques <strong>et</strong> sociologiques pour appréhen<strong>de</strong>r les situations scripturaires<br />

actuelles.<br />

Le troisième niveau d’analyse est celui <strong><strong>de</strong>s</strong> actes techniques relevant <strong>de</strong><br />

s a v o i r- f a i re scripturaires professionnels. Les difficultés rencontrées dans le<br />

s é m i n a i re pour définir <strong><strong>de</strong>s</strong> actes « s a v a n t s » signalent l’intérêt d’une appro c h e<br />

i n t e rd i s c i p l i n a i re. Par exemple les termes transcrire, translittére r, traduire ne<br />

re c o u v ren t pas les mêmes pratiques selon les disciplines (linguistique <strong>et</strong> philologie<br />

en particulier). Ces actes relèvent <strong>de</strong> savoir-faire l<strong>et</strong>trés qui ont varié selon<br />

les époques <strong>et</strong> les écoles. Il en va <strong>de</strong> même pour <strong><strong>de</strong>s</strong> actes tels que décrypter<br />

<strong>et</strong> déchiffrer dont l’histoire multiforme reste à faire <strong>et</strong> l’actualité reste à analyser<br />

à partir <strong>de</strong> cas précis.<br />

Plusieurs intervenants ont présenté <strong><strong>de</strong>s</strong> re c h e rches portant moins sur <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

actes que sur <strong><strong>de</strong>s</strong> actions d’écriture qui se déroulent sur du long terme, impliquant<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> agents multiples, <strong><strong>de</strong>s</strong> lieux divers, <strong><strong>de</strong>s</strong> enchaînements d’actes. L’acte<br />

<strong>de</strong> copier a notamment fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> plusieurs présentations. Philippe Artière s<br />

a proposé une analyse historique <strong>de</strong> l’acte <strong>de</strong> copier omniprésent dans les examens<br />

pratiqués par les mé<strong>de</strong>cins aliénistes au X I X e siècle. Copier est tout<br />

d ’ a b o rd perçu comme une faculté indépendante <strong>de</strong> celle d’écrire puis <strong>de</strong>vient<br />

l ’ é p reuve qui manifeste la mémoire <strong><strong>de</strong>s</strong> signes. Jérôme Denis dans une perspective<br />

microsociologique a souligné les diff é rents régimes <strong>de</strong> copier <strong>et</strong> re c op<br />

i e r. L’observation fine <strong>de</strong> situations <strong>de</strong> travail montre que l’on copie pour<br />

s a u v e g a rd e r, pour déléguer, pour agencer <strong>et</strong> pour partager. La valeur pragmatique<br />

<strong>de</strong> la copie dépend <strong>de</strong> ces usages multiples.<br />

Nathalie Heinich a exposé les premiers résultats d’une enquête sur le travail<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> chercheurs chargés d’établir les œuvres dignes d’être inscrites à l’Inventaire<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> monuments historiques. Ici l’action générale d’inventorier prend toute sa<br />

dimension sociale <strong>et</strong> institutionnelle mais aussi individuelle puisque les chercheurs<br />

développent un « regard » formaté par l’inscription.<br />

Le bilan du séminaire révèle notre constante préoccupation méthodologique.<br />

Définir <strong>et</strong> décrire <strong><strong>de</strong>s</strong> actes d’écriture suppose un cadre d’analyse explicite<br />

que c<strong>et</strong>te année a permis <strong>de</strong> mieux préciser.

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