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Ville

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LES LANGAGES DE LA VILLE<br />

appliquer les modèles du faire (je le fais comme l’a fait maman), de l’être (je<br />

suis comme je suis, c’est-à-dire comme un nombre considérable d’entre<br />

nous), du dire (je dis comme on l’a dit jusqu’ici.). Le stéréotype c’est un<br />

« appris » ou un « à apprendre » : on apprend à respecter les stéréotypes qui<br />

apparaissent comme des régulateurs de nos actes, de nos actions et de nos<br />

activités.<br />

Quelle que soit la nature de notre faire, nous agissons en respectant<br />

consciemment ou inconsciemment des modèles bien réglés, bien mis en<br />

place ; et ce n’est que rarement que nous les contournons, et ce pour des<br />

raisons telles que la référence simultanée à des valeurs contradictoires.<br />

La pratique des stéréotypes peut être ramenée à une imitation de<br />

l’Autre. Elle implique pourtant de la création car son usage suppose la<br />

transformation de l’ancien stéréotype en quelque chose de nouveau, de<br />

différent, de ce qui était ordinaire et caractérisait la vie quotidienne.<br />

Toute intériorisation d’un fragment de la réalité se fait en rapportant<br />

ce fragment découpé dans la continuité matérielle ou temporelle à quelque<br />

chose de commun ou pas commun, de connu ou d’inconnu, d’ancien ou de<br />

nouveau, à un ensemble d’entités dont la forme d’existence est celle des<br />

schèmes conceptuels.<br />

Selon R. Amossy les stéréotypes schématisent et catégorisent, les<br />

deux opérations étant conçues comme indispensables pour la cognition [3,<br />

p. 28]. La catégorie de l’expérience a son rôle bien évident dans la<br />

construction et la constitution de ces entités. Au cours de leur répétition<br />

l’application de tel ou tel stéréotype devient en quelque sorte mécanique.<br />

Il s’avère que tous nos actes langagiers, physiques et mentaux,<br />

subissent l’influence des stéréotypes, le cerveau étant le porteur et également<br />

le générateur de ces entités.<br />

Le « stéréotypé » se situe à l’opposé de « l’événementiel », ce<br />

dernier se présentant comme quelque chose d’inconnu, assez souvent comme<br />

un phénomène inattendu, peu ordinaire, n’ayant pas de fonction de<br />

régulation, mais jouant au contraire celle de modificateur. Dans certains cas<br />

le sujet ne consent pas à la rupture du stéréotypé par l’événementiel.<br />

La vie humaine se présente à notre esprit comme structurée par<br />

l’alternance du stéréotypé et de l’événementiel, le premier constituant un<br />

espace non perceptible, une espèce de fondement sur lequel se produit le fait<br />

événementiel. Mais on constate assez souvent que l’événementiel est généré<br />

par le stéréotypé qui devient alors perceptible par effet de contraste.<br />

LES OUTILS LEXICAUX ET GRAMMATICAUX DES<br />

STEREOTYPES DE LA VILLE DANS LE ROMAN DE CAMUS.<br />

Récit, œuvre d’historien au dire du narrateur, le roman s’articule en<br />

plusieurs parties : dans les premières pages on reproduit la vie stéréotypée<br />

des Oranais ; la deuxième partie est réservée à la révélation de l’avènement<br />

de l’événementiel, à sa venue sans avertissement, sous la forme de l’invasion<br />

des rats ; à ce stade les stéréotypes de la ville des temps ordinaires et<br />

l’événementiel coexistent ; la plus grande partie de la chronique est<br />

consacrée à l’installation et à la domination de l’événementiel, aux<br />

manifestations de la peste, à ses effets désastreux, qui donnent naissance à de<br />

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