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LES LANGAGES DE LA VILLE<br />
2. LIRE LA VILLE A TRAVERS LA PAROLE DES ADOLESCENTS<br />
2.1. Présentation de la recherche<br />
Une première recherche sur le langage et les pratiques langagières,<br />
appuyée sur les travaux de C. Bachmann et de W. Labov, avait choisi<br />
d’étudier le parler des élèves d’un collège d’Aubervilliers en Seine Saint-<br />
Denis, en 1985. Cette première étude avait mis en évidence l’existence de<br />
pratiques langagières comme les vannes, la grande créativité langagière des<br />
collégiens, l’existence de « langues » telle la langue de « Feu », le<br />
fonctionnement de l’insulte et l’influence des communautés en présence dans<br />
le quartier où j’ai enquêté, manifestée à travers les insultes et les pratiques<br />
langagières qui semblent propres à la ville. Etaient manifestes aussi la<br />
conscience au plan des pratiques langagières et les différences entre garçons<br />
et filles.<br />
Afin de poursuivre cette recherche pour mieux comprendre les<br />
parlers de collégiens, j’ai choisi Rennes où j’arrive en 1995, et que je ne<br />
connais pas : Les pratiques langagières sociales, dans ce territoire réputé non<br />
violent qu’est Rennes, sont analysées à partir des collèges où le recrutement<br />
mélange les populations issues de divers quartiers, ce que je découvre à<br />
travers la parole des jeunes. Au-delà du parler violent que j’ai étudié la<br />
première fois, j’ai voulu comprendre le lien entre le parler et ce que j’ai<br />
nommé les « territoires », terme qui n’est pas forcément adapté dans ce cas<br />
par ailleurs. Cette recherche a été menée entre 97 et 99 et le rapport écrit à la<br />
suite, donc diffusé en 2000 auprès des participants et des institutionnels ou<br />
principaux de collèges de la ville, aux fins de restitution des savoirs<br />
construits.<br />
Puis ont été menés le diagnostic du CEL pour une ville et le suivi<br />
d’un conseil de jeunes expérimental sur un des quartiers, entre 1998 et 2000,<br />
participation au départ puis suivi à distance. Actuellement est menée aussi<br />
une observation participante dans cette Maison de Quartier depuis le C.A.<br />
pour une meilleure prise en compte du jeune, donc de sa parole, une<br />
implication plus forte. La <strong>Ville</strong> prend aussi en compte cette question, au-delà<br />
de cette initiative propre au quartier.<br />
Par ailleurs, je m’intéresse aux chocs dans l’école des cultures :<br />
adulte/jeunes, français/d’origine autre, et ville/campagne que je découvre car<br />
ce n’était pas présent dans le 93 où j’ai fait la première étude. La didactique<br />
de l’oral rencontre ces problématiques, autre champ de mes recherches, dans<br />
la communauté parfois explosive qu’est la classe à travers la question de la<br />
variation et de la variété acceptée par l’école, des pratiques langagières<br />
propres à l’école et des dimensions multiples que je ne peux qu’évoquer,<br />
liées à la ville et à ses communautés spécifiques. Les échanges dans la classe<br />
sont des lieux possibles de conflits. En dehors d’une curiosité scientifique<br />
pour une autre culture, l’objectif est de comprendre comment se font les<br />
échanges dans la classe, comment émergent les conflits de cultures, ces<br />
obstacles à la didactique de l’oral, qui par ailleurs continue de se construire<br />
avec des équipes d’enseignants.<br />
Du point de vue méthodologique, des étudiants en sciences de<br />
l’éducation, des doctorants, ont recueilli les données car l’IUFM ne permet<br />
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