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Ville

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LES LANGAGES DE LA VILLE<br />

université et des instituts supérieurs, qui forment, eux aussi, des chômeurs en<br />

masse et sans compétence réelle ; sans savoir-faire et savoir-être rassurants,<br />

pour ce que la société exige d’un cadre dans le monde entier. D’où le<br />

phénomène de l’école monstre qui dévore les enfants que le pays lui<br />

confie, parce qu’elle les rend bons à rien et les prépare à fuir leur pays, s’il y<br />

a moyen.<br />

Le problème du «sauve qui peut » observé à Bujumbura, n’est donc<br />

qu’un arbre qui cache une forêt. Et la forêt, c’est comme il est déjà stipulé,<br />

l’acculturation par substitution et l’aliénation culturelle, déjà observée plus<br />

haut, où l’apprenant étudie, en filigrane pour vivre ailleurs que dans son pays.<br />

Pour lui, le fait de rester dans le pays, a été souvent, depuis des décades,<br />

considéré comme un malheur. Il n’y est pas formé suffisamment. Il n’a pas le<br />

cœur à cela. Il recherche constamment le départ du Pays. Il le tente de<br />

toutes ses forces et il cherche parfois des prétextes pour cela, puisqu’il n’a<br />

pas été formé pour rester chez lui. Il a été formé pour l’émigration<br />

culturelle. Il puise ses ressources ailleurs, bien loin.<br />

En un mot, l’on peut dire que la tête de l’apprenant de l’école de<br />

Bujumbura, est une machine à la dérive, qui a perdu sa finalité et qui a du<br />

mal à être dotée d’un savoir-être suffisant, pour affronter la vie autour d’elle.<br />

Très peu d’élèves se sentent en effet une vocation, au niveau des valeurs à<br />

incarner, l’école étant une salle d’attente en vue de la recherche d’une<br />

carrière à base du seul paraître et du lancinant désir de partir 1 .<br />

L’apprenant de Bujumbura est à l’école, pour devenir un nageur<br />

profondément troublé dans sa traversée et cherchant désespérément, où<br />

s’agripper. Pour le moment il s’agrippe aveuglement sur le « Blanc » : un peu<br />

dans le sens de la phrase que la «fama Africana» prête à Houphouet Boigny :<br />

« Dieu est grand. Mais le Blanc aussi est grand ». De toutes façons, les<br />

Noirs qui pensent ainsi sont nombreux.<br />

Tout cela résulte de la violence conceptuelle effectuée au départ, au<br />

temps de la colonisation. Violence qui s’approfondit aujourd’hui, avec la<br />

communication audiovisuelle, presque à sens unique. Ce qui donne, toujours<br />

plus, un apprenant cherchant à se connaître à travers ce qu’on lui dit qu’il<br />

est ; un apprenant qui n’a plus envie de le savoir de par lui-même ; un<br />

apprenant qui a perdu ses points d’ancrage ; un apprenant devenu un homme<br />

de paille. D’où beaucoup de forces centrifuges, propres à provoquer la fuite<br />

vers un ailleurs<br />

4. LES FORCES CENTRIFUGES SUBSUMANT LA FORMATION A<br />

LA FUITE VERS UN AILLEURS<br />

La flamme a donc quitté l’apprenant de Bujumbura 2 . Elle est<br />

dans un ailleurs inconnu. C’est pourquoi, il fait tout pour se fuir et aller vers<br />

1 Cf. Jacques NIYONGABO, « La démocratisation de l’éducation pour une paix durable », in<br />

ACA, 1998/3, pp. 415-439.<br />

2 Une approche précieuse sur ce point mériterait beaucoup d’attention. Cf. A. SINDAKIRA,<br />

« Les facteurs culturels du développement », in ACA, 1999/4, pp. 439-464.<br />

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