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Ville

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VILLE ET PAROLE DES JEUNES<br />

les parlers peuvent présenter des différences. Ils citent notamment le quartier<br />

X où vivent des manouches et que cela influe sur le parler local. Ils ont<br />

conscience que des expressions arabes existent en certains lieux. ils indiquent<br />

aussi qu’en sixième, le langage n’est pas le même, qu’il existe par ailleurs<br />

des mots à la mode. Ils pensent, en donnant un exemple, que certains mots<br />

viennent de Paris et mettent un certain temps pour arriver à Rennes. D’autres<br />

mots viennent de Marseille, autre lieu mythique, comme sont mythiques<br />

aussi Sarcelles ou Saint-Denis. Ils ont une géographie dans leur<br />

représentation des parlers urbains.<br />

3. PAROLE DE JEUNES, PAROLE D’ADULTES<br />

La place de cette parole de jeunes dans la ville, dans les lieux que<br />

j’ai étudiés du moins, au-delà de l’établissement scolaire, apparaît à la fois<br />

comme encouragée et jugulée par la parole des adultes, tant dans le cadre<br />

d’une maison de quartier à Rennes que du conseil municipal des jeunes mis<br />

en place dans une ville qui a fait l’objet de l’étude diagnostique pour le CEL.<br />

Dans la classe, il faut renvoyer aux travaux de la sociologie anglaise, de<br />

l’ethnographie aussi qui analyse les places et les modèles des échanges dans<br />

la classe. Il apparaît que ce parler d’adolescents se construit à des fins<br />

identitaires, pour se démarquer de la parole institutionnelle et adulte, partie<br />

d’une culture qui au-delà des quartiers apparaît comme commune aux<br />

adolescents d’un même établissement. « Ils ne veulent pas parler aux<br />

adultes », dit un responsable de centre de jeunesse lors d’une réunion<br />

organisée par la <strong>Ville</strong>.<br />

Elle est, surtout à Rennes, une construction dans l’esprit des jeunes<br />

car les différences sont faibles par rapport au langage des adultes mais<br />

cependant suffisantes pour que ceux-ci ressentent cette différence plutôt<br />

comme une agression contre leur propre culture. Ce parler fédère aussi la<br />

plupart des collégiens, qui adhérent avec plus ou moins de conviction, de<br />

façon différenciée, à cette culture qui rassemble des quartiers différents. On<br />

lit à travers ce qu’ils disent un effet de la politique de la ville aussi quant aux<br />

secteurs de recrutement des collèges.<br />

Dans les conseils de jeunes de quartier et municipaux, il convient de<br />

pousser l’étude plus loin que je ne l’ai fait au plan linguistique notamment.<br />

Dans la maison de quartier de l’un des quartiers de Rennes, le conseil est né<br />

d’une initiative d’un enseignant, encouragée par la direction du collège, et de<br />

la structure de quartier. Il est mis en place en même temps que le conseil des<br />

adultes, pionnier alors. Mais si ces conseils permettent à certains jeunes de<br />

prendre de l’assurance, de faire entendre des projets, pour la plupart, c’est<br />

difficile de faire entendre sa parole, face à un adulte qui, comme dans la<br />

classe, monopolise l’ensemble des composantes, face aussi à des animateurs<br />

qui ont envie de faire passer leurs propres projets. Même au conseil<br />

d’administration où certains jeunes de 19 ou 20 ans sont élus, le partage ne se<br />

fait pas bien et on perçoit la tutelle de tel ou tel administrateur. Il faut<br />

déconstruire ce que l’école, et la société aussi sans doute, ont construit dans<br />

les comportements pour prendre vraiment ce pouvoir de parole. C’est autant<br />

une rééducation de l’adulte que du jeune qu’il faut entreprendre de ce point<br />

de vue.<br />

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