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VILLE ET PAROLE DES JEUNES<br />
pas à ses étudiants de participer à de telles recherches. Quel dommage !<br />
L’observation s’est voulue participante au sens ethnographique, chacun<br />
négociant son entrée sur le terrain. Des entretiens avec des groupes d’élèves<br />
et les usagers des établissements ont été menés et ces paroles ont été prises en<br />
compte dans une perspective ethnométhodologique. Prise en compte donc<br />
non seulement des phénomènes linguistiques, des pratiques langagières, mais<br />
aussi inscription de ces faits dans la culture globale des collégiens.<br />
2.2. Difficultés de la méthode<br />
Cette modalité du recueil des données a posé quelques problèmes à certains<br />
observateurs, comme en témoigne l’extrait du journal de bord suivant :<br />
« Dans un premier temps (décembre 97 et janvier 98), je choisis d’observer la cour de<br />
récréation pensant passer plus inaperçue, mais par rapport à l’idée que je m’étais faite<br />
de la façon dont les choses allaient pouvoir se dérouler, je me heurtai rapidement à une<br />
série de problèmes que je n’aurais pas soupçonnés : les élèves venaient me voir, se<br />
demandant ce que je pouvais bien faire là, m’interpellant en me considérant comme une<br />
nouvelle « pionne », et ils restaient agglutinés autour de moi sans que je puisse prendre<br />
une seule note ; et lorsqu’ils commencèrent à s’habituer à ma présence, il m’était aussi<br />
très difficile de recueillir beaucoup de données car les élèves se taisaient plus ou moins<br />
à mon approche contrôlaient leur vocabulaire ou au contraire, déversaient un flot<br />
d’injures en guise de faire-valoir. […] Je précise que je prenais tout simplement des<br />
notes (carnet-stylo). »<br />
2.3. Les mots disent la ville et ses communautés<br />
L’enquête montre un style urbain que les observateurs caractérisent<br />
ainsi :<br />
« Je peux noter une relation agressive entre les élèves, comme s’ils avaient<br />
toujours quelque chose à démontrer, à prouver, en termes de force ou de<br />
supériorité. Ils sont très provocateurs entre eux par le geste, le corporel<br />
(croche-pieds, bousculade, bourrades..) cependant je ne remarque pas de<br />
violence caractérisée. Ils se taquinent en permanence sur le mode verbal ou<br />
sur le mode physique, et toujours en termes de défi par rapport à l’autre. Ce<br />
phénomène est visible et descriptible chez les deux sexes. Ils engagent des<br />
stratégies de querelles, qui sont souvent amorcées par des remarques à<br />
caractère ethnique ou social. »<br />
En somme, conclut l’un d’entre eux :<br />
« Il s’agit d’un mode de communication pour nombre d’élèves. Ils passent<br />
leur temps à chercher l’autre, une espèce de défi permanent, un défi par la<br />
comparaison (physique, vestimentaire, sociale…) et/ou par la raillerie. »<br />
A la vérité, avec une fréquence variable selon les lieux, le ton monte<br />
et on en vient aux coups selon un rite dont les élèves connaissent les codes et<br />
les expriment dans les entretiens. Ceci est vrai en ville mais pas « à la<br />
campagne » où les relations restent meilleures, selon les surveillants, et les<br />
élèves plus calmes.<br />
<strong>Ville</strong>/campagne<br />
Les quartiers sont évoqués comme source de différence par les<br />
élèves mais pas tant que l’opposition ville/campagne. « Ceux de X<br />
connaissent mieux le langage du collège », « tous les jours ils parlent comme<br />
ça dans tous les collèges sauf à la campagne » disent des élèves les<br />
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