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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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maintenant bien connu est qu’après <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts, peu importe leur petite taille et leur peu<br />

d’importance, tous les types <strong>de</strong> symptômes nerveux apparaissent qui, associés à une désorientation<br />

hypocondriaque générale, ren<strong>de</strong>nt alors la personne en question incapable <strong>de</strong> <strong>travail</strong>ler et dans le<br />

même temps assurée du droit d’obtenir une pension en accord avec son état. Il ne s’agit pas, comme<br />

nous le soutenions au début, d’une forme <strong>de</strong> simulation, ou d’une imitation volontaire <strong>de</strong> symptômes<br />

inexistants. Ces individus sont en effet mala<strong>de</strong>s, mais ils <strong>de</strong>vraient aller bien, assez étrangement, si la<br />

loi n’existait pas. 1<br />

<strong>Le</strong> 10 ième Congrès médical international <strong>de</strong> Berlin en 1890 vit l’opposition aux thèses<br />

d’Oppenheim se structurer autour <strong>de</strong> trois grands arguments : d’avoir sous-estimé la question <strong>de</strong> la<br />

simulation, <strong>de</strong> ne pas avoir pris en considération la prédisposition, et pour certains d’avoir fait <strong>de</strong> la<br />

névrose traumatique une entité autonome plutôt qu’un terme générique pour décrire les multiples<br />

réactions pathologiques à un événement traumatique.<br />

Concernant la prédisposition, ses tenants reprenaient en fait les positions <strong>de</strong> Charcot pour qui<br />

l’événement ne constituait au plus qu’un facteur catalyseur et non une véritable cause.<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Mais ce qui unissait ces diverses objections était une préoccupation partagée pour le coût <strong>de</strong> la<br />

névrose traumatique et la peur qu’elle puisse déclencher une épidémie d’hémorragie financière qui<br />

saperait le pouvoir productif germanique. 2<br />

<strong>Le</strong>s arguments fournis par Oppenheim en réponse furent toujours les mêmes, en particulier<br />

le manque d’expérience clinique en psychiatrie et en neurologie <strong>de</strong> nombreux praticiens incapables<br />

<strong>de</strong> reconnaître la légitimité <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong> symptômes <strong>psychique</strong>s hors toute lésion organique.<br />

D’où une position semble-t-il <strong>de</strong> plus en plus désabusée :<br />

<strong>Le</strong> terme <strong>de</strong> névrose traumatique a été partout banni et rendu tabou, la conception <strong>de</strong> l’hystérie<br />

traumatique a été reconnue, mais ternie par le fait qu’aucun lien évi<strong>de</strong>nt entre elle et la simulation<br />

n’ait pu être établi. <strong>Le</strong> trauma a été regardé comme causé non par un acci<strong>de</strong>nt mais par <strong>de</strong>s complexes<br />

<strong>de</strong> désirs imaginaires. 3<br />

L’entité connaîtra malgré tout <strong>de</strong> son temps une reconnaissance, et non <strong>de</strong>s moindres, celle<br />

d’Emil Kraepelin (1856-1926), considéré comme le fondateur <strong>de</strong> la psychiatrie germanique mo<strong>de</strong>rne.<br />

En 1899, celui-ci introduit en effet dans la 6 ième édition <strong>de</strong> son Compendium <strong>de</strong>r Psychiatrie une entité<br />

nouvelle par rapport aux précé<strong>de</strong>ntes éditions, la « névrose d’effroi » (Schreckneurose), dans les faits<br />

une reprise <strong>de</strong> la névrose traumatique d’Oppenheim.<br />

C. Barrois (1988) a résumé les conceptions cliniques <strong>de</strong> Kraepelin ainsi :<br />

Cliniquement, il insistait s’abord sur les signes d’incapacité, <strong>de</strong> dépression, et faisait une large place<br />

aux ruminations répétitives, sous forme <strong>de</strong> représentations torturantes. Parfois se rencontrent <strong>de</strong>s<br />

obsessions, <strong>de</strong> l’agoraphobie et <strong>de</strong>s plaintes hypocondriaques.<br />

Ces patients sont instables, « mal dans leur peau », présentent <strong>de</strong>s difficultés relationnelles et une<br />

réduction <strong>de</strong> leur champ d’intérêts. Fatigables, ils <strong>de</strong>viennent inaptes au <strong>travail</strong>, et font <strong>de</strong><br />

nombreuses erreurs. Parfois <strong>de</strong>s états crépusculaires, <strong>de</strong>s états d’agitation « hallucinatoires » aiguë,<br />

1 Alfred E.Hoche (1915), cité par P. <strong>Le</strong>rner, op.cit, p 151, traduction personnelle.<br />

2 P. <strong>Le</strong>rner, ibid., p. 152, traduction personnelle.<br />

3 Oppenheim (1915) : Der krieg und die traumatischen neurosen, p 257, cité par P. <strong>Le</strong>rner, ibid., p 152,<br />

traduction personnelle.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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