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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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Freud ne manque jamais l’occasion d’affirmer que le matériel clinique sur lequel il s’appuie n’est<br />

accessible que dans les conditions réalisées par l’approche « <strong>psycho</strong>analytique » découverte par<br />

Breuer et que lui-même ne cesse <strong>de</strong> peaufiner. Il écrit ainsi en 1896 :<br />

Pour la <strong>de</strong>uxième classe <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s névroses, hystérie et névrose d’obsession, la solution <strong>de</strong> la<br />

question étiologique est d’une simplicité et d’une uniformité surprenante. Je dois mes résultats à<br />

l’emploi d’une nouvelle métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>analyse, au procédé explorateur <strong>de</strong> J. Breuer, un peu<br />

subtil, mais qu’on ne saurait remplacer, tant il s’est montré fertile pour éclaircir les voies obscures <strong>de</strong><br />

l’idéation inconsciente. Au moyen <strong>de</strong> ce procédé… on poursuit les symptômes hystériques jusqu’à leur<br />

origine qu’on trouve toutes les fois dans un événement <strong>de</strong> la vie sexuelle du sujet bien propre à<br />

produire une émotion pénible. 1<br />

La « structure <strong>de</strong> l’hystérie », son architecture, semble évoluer dans le même temps et le même<br />

mouvement que la métho<strong>de</strong> <strong>psycho</strong>analytique s’affine et permet <strong>de</strong> l’explorer <strong>de</strong> façon <strong>de</strong> plus en<br />

plus approfondie ; ainsi la note II <strong>de</strong> la lettre à Fliess du 25-5-97 :<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Cette structure est probablement la suivante. Quelques-unes <strong>de</strong>s scènes sont directement accessibles,<br />

d’autre seulement par l’intermédiaire <strong>de</strong> fantasmes interposés. Elles s’ordonnent suivant une<br />

résistance croissante ; les moins refoulées surgissent les premières, mais d’une façon incomplète à<br />

cause <strong>de</strong> leur association avec <strong>de</strong>s scènes plus refoulées. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> analytique s’effectue par une série<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>scentes, d’abord jusqu’aux scènes ou à leur voisinage, puis un peu plus profondément encore à<br />

partir d’un symptôme et enfin plus bas encore. Etant donné que la plupart <strong>de</strong>s scènes ne convergent<br />

que vers quelques symptômes seulement, la voie que nous empruntons suit une ligne au travers <strong>de</strong>s<br />

pensées qui se trouvent à l’arrière-plan <strong>de</strong>s mêmes symptômes. 2<br />

Cette exploration pas à pas <strong>de</strong> l’étiologie sexuelle <strong>de</strong>s névroses prend une forme <strong>de</strong> plus en plus<br />

assurée et conduit à sa formalisation la plus complète dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> l’ Esquisse d’une<br />

<strong>psycho</strong>logie scientifique intitulée « Psychopathologie », dont l’on situe l’écriture à l’automne 1895 (S.<br />

Freud, 1956). Cette partie est naturellement consacrée à l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s processus pathologiques et à<br />

ceux <strong>de</strong> la névrose hystérique en particulier.<br />

Notons que si Freud a fait usage à <strong>de</strong> multiples reprises du terme <strong>de</strong> Verführung (traduit en français<br />

par le vocable <strong>de</strong> séduction) et cela à partir <strong>de</strong> 1893 3 , il ne semble pas en avoir conçu jusqu’alors<br />

l’idée qu’il puisse s’agir d’une théorie en tant que telle. L’expression se justifie cependant <strong>de</strong> ce que<br />

la séduction est au centre d’une conception cohérente et achevée <strong>de</strong> l’étiologie <strong>de</strong> l’hystérie, même<br />

si rapi<strong>de</strong>ment Freud en révisera certains <strong>de</strong>s éléments les plus importants. Il y a là une première<br />

modélisation fondée d’une part sur la conviction <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong> l’étiologie sexuelle <strong>de</strong>s névroses,<br />

et d’autre part sur une complexification significative du rapport <strong>de</strong> causalité entre un événement et<br />

la production <strong>de</strong>s symptômes névrotiques.<br />

Cette théorie, dans le prolongement <strong>de</strong> la communication préliminaire, s’attache à rendre<br />

compte <strong>de</strong> l’effet souvent disproportionné entre l’apparente banalité <strong>de</strong> certains événements et<br />

leurs effets pathogènes sur le psychisme, au point d’être à l’origine <strong>de</strong> la survenue <strong>de</strong> symptômes<br />

1 S. Freud (1896) : L’hérédité et l’étiologie <strong>de</strong>s névroses, In La première théorie <strong>de</strong>s névroses, p. 89-90.<br />

2 S. Freud (1956) : La naissance <strong>de</strong> la psychanalyse, PUF, 8 ième éd., 2002, Paris, p. 179.<br />

3 Selon le controversé, mais très documenté, ouvrage <strong>de</strong> J.M. Masson, <strong>Le</strong> réel escamoté, la première trace écrite<br />

<strong>de</strong> l’hypothèse d’abus sexuels lors <strong>de</strong> la prime enfance remonterait au 30 mai 1893, dans un passage d’une lettre<br />

<strong>de</strong> Freud à Fliess caviardé dans la première publication <strong>de</strong> leur correspondance.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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