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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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Exemple n° 37 :<br />

Un comportement « post-traumatique » <strong>de</strong> « jeu pathologique »<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Cet homme, cantonnier <strong>de</strong> métier, était au fond d’une fosse quand un containeur plein<br />

<strong>de</strong> terre glisse et bascule sur lui. Il se trouve à moitié enseveli sous <strong>de</strong>ux tonnes <strong>de</strong> terre et il<br />

faudra plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux heures pour le dégager. Il en ressortira avec le bassin fracturé et <strong>de</strong><br />

multiples séquelles physiques handicapantes. Ce qu’il vit pendant tout le temps <strong>de</strong> la<br />

désincarcération est effrayant : portant <strong>de</strong>s cuissar<strong>de</strong>s, il a le sentiment que sous la pression<br />

extrême <strong>de</strong> la terre, ses jambes ont été broyées et que ses bottes se remplissent <strong>de</strong> son sang. Il<br />

mettra plusieurs heures à réaliser que ce n’était qu’une sensation et que ses jambes n’ont pas<br />

éclaté. Après plusieurs mois <strong>de</strong> soins, il reprend le <strong>travail</strong> sur un poste aménagé mais ne<br />

parvient pas à « reprendre pied dans la réalité ». Il consulte un an après l’acci<strong>de</strong>nt sur<br />

l’insistance <strong>de</strong> sa femme qui le menace <strong>de</strong> divorcer tellement elle est excédée par ses<br />

comportements : il ne s’intéresse plus à rien, a désinvesti la vie familiale (il ne fait plus rien à la<br />

maison sinon regar<strong>de</strong>r la télévision, délaisse les enfants, n’assure plus les tâches <strong>de</strong><br />

bricolage…), est irritable, s’alcoolise quotidiennement et, parvient-il à difficilement dire, a<br />

dilapidé toutes les économies du ménage en quelques mois. Questionné sur la signification <strong>de</strong><br />

ce <strong>de</strong>rnier comportement, il dit que sa vie n’a plus <strong>de</strong> sens, qu’il a <strong>de</strong>s envies <strong>de</strong> suici<strong>de</strong>, et que<br />

quand il joue (au tiercé) il joue sa vie à quitte ou double : s’il gagne, il pourra partir en laissant<br />

<strong>de</strong> quoi vivre à sa famille, s’il perd, <strong>de</strong> toutes les façons sa vie est « fichue » et rien n’a plus<br />

d’importance.<br />

L’on peut alors voir dans ce comportement <strong>de</strong> jeu l’envers du « syndrome du risque zéro »<br />

dans la mesure où cet homme se met en danger, ainsi que sa famille, dans une confrontation<br />

répétée activement recherchée à ce qu’il vit comme étant le <strong>de</strong>stin et s’en remet<br />

compulsivement à ce que celui-ci lui réserve comme sort. <strong>Le</strong> jeu ne va pas ici sans évoquer a<br />

minima dans son principe, la « roulette russe ».<br />

Si, dans le syndrome du risque zéro, l’on a affaire à un sujet qui ne cesse <strong>de</strong> tenter <strong>de</strong> prendre<br />

en main son existence sur le mo<strong>de</strong> d’un « toujours plus <strong>de</strong> précautions », ici c’est un « être<br />

soumis à l’aléatoire du mon<strong>de</strong>» qui se laisse entrevoir, un être qui n’a prise sur rien, sinon sur<br />

la répétition elle-même en tant, aurait pu dire Lacan, qu’elle est résistance à la rencontre du<br />

réel, ici l’aléatoire.<br />

La question se pose ici <strong>de</strong>s rapports qu’il serait possible d’établir entre victimisation et agir<br />

violent, <strong>de</strong> nature sexuelle ou non, à partir <strong>de</strong> notre modèle du Travail <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong>.<br />

L’existence, dans la biographie <strong>de</strong> nombreux agresseurs, <strong>de</strong> violences traumatiques précocement<br />

subies, leur intolérance à certaines situations comme celle <strong>de</strong> conflit l’accent <strong>de</strong> plus en plus porté<br />

par la criminologie contemporaine sur les facteurs circonstanciels, précipitants parce que<br />

vulnérabilisants dans la survenue <strong>de</strong> nombreux comportements violents, etc., (B. Gravier, 2008),<br />

vont dans ce sens.<br />

Ainsi, à partir <strong>de</strong> cette esquisse <strong>de</strong> typologie <strong>de</strong>s positions victimales hétéro-<strong>de</strong>structrices, il semble<br />

possible d’imaginer, sur d’autres bases notamment que l’i<strong>de</strong>ntification à l’agresseur, comment une<br />

position victimale peut donner lieu à <strong>de</strong>s aménagements hétéro-agressifs et donner lieu à <strong>de</strong>s agirs<br />

violents comme <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’aménagement victimaux.<br />

De même, le modèle du TPV semble susceptible <strong>de</strong> contribuer à l’analyse et à la différenciation d’un<br />

certain nombre <strong>de</strong> troubles chez les sujets agresseurs, en permettant notamment <strong>de</strong> différencier ce<br />

qui relèverait chez eux <strong>de</strong> carences quant à leurs capacités à différencier <strong>de</strong> l’auteur et <strong>de</strong> la <strong>victime</strong>,<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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