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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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M.J Eissen (1919), quant à lui, Mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> l’asile <strong>de</strong> Stephansfeld, offre une autre ligne<br />

d’interprétation <strong>de</strong> la sinistrose, donnant <strong>de</strong> celle-ci l’exemple d’un sujet acci<strong>de</strong>nté qui, ayant repris<br />

immédiatement le <strong>travail</strong>, présente 3 ans plus tard <strong>de</strong>s crises d’épilepsie. Il est par ailleurs<br />

diagnostiqué comme alcoolique. Imputant ces crises à l’acci<strong>de</strong>nt et se voyant refuser la pension qu’il<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> en conséquence, l’on voit les symptômes s’accumuler et se diversifier au fil <strong>de</strong>s expertises.<br />

Rogues <strong>de</strong> Fursac, discutant la communication d’Eissen, et bien que notant le délai extrêmement<br />

long d’apparition <strong>de</strong> la sinistrose et l’absence <strong>de</strong> lien direct entre les douleurs obsédantes et les<br />

circonstances <strong>de</strong> l’acci<strong>de</strong>nt sur lequel insistait Brissaud, n’en propose pas moins <strong>de</strong> donner à ce qui<br />

lui semble en être malgré tout une forme tardive, le nom <strong>de</strong> « sinistrose retardée », car il en retrouve<br />

par ailleurs les principaux signes : « préoccupations hypocondriaques, tendances processives, souci<br />

d’établir par tous les moyens possibles la réalité et l’importance du dommage subi, aggravation<br />

progressive <strong>de</strong>s revendications formulées… ». A l’inverse, Vallon conteste ce diagnostic et opte pour<br />

la thèse <strong>de</strong> la simulation en raison du délai considérable entre l’acci<strong>de</strong>nt et la revendication.<br />

La thèse <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong> L. Monthelie en 1906, dont l’on trouve les conclusions dans un court article,<br />

offre un exemple <strong>de</strong> reconnaissance pleine et entière <strong>de</strong> la névrose traumatique :<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

La névrose traumatique occasionne le plus souvent une incapacité <strong>de</strong> <strong>travail</strong>, <strong>de</strong> durée illimitée, ne<br />

prenant que rarement fin avant la solution définitive du procès, d’où les difficultés pour le règlement<br />

<strong>de</strong> l’in<strong>de</strong>mnité<br />

Pour les formes graves, la maladie ayant une durée fort longue doit pratiquement être considérée<br />

comme cause d’une incapacité absolue et permanente…<br />

Enfin il importe <strong>de</strong> savoir que la névrose traumatique aboutit parfois au suici<strong>de</strong>, qui peut en être jugé<br />

comme une conséquence directe, donnant droit à l’allocation d’une rente viagère à la veuve. 1<br />

En 1913, le Dr J. ROUX, mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong>s hôpitaux, dans un petit ouvrage posthume consacré aux<br />

« névroses post-traumatiques », regroupe sous ce terme l’hystérie, la neurasthénie et « les<br />

sinistroses ».<br />

Dans les suites directes du démembrement <strong>de</strong> l’hystérie par Babinski, Roux conclut à la rareté <strong>de</strong><br />

l’hystérie et <strong>de</strong> la neurasthénie. Egalement réticent à l’égard <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> névrose traumatique<br />

aux contours qu’il juge trop flous il tente, d’une part <strong>de</strong> redonner à l’étiologie organique une<br />

importance plus gran<strong>de</strong> dans les troubles « post-traumatiques », d’autre part <strong>de</strong> rechercher d’autres<br />

formes d’états névrotiques qui avaient été jusqu’alors abusivement assimilés à <strong>de</strong> l’hystérie ou <strong>de</strong> la<br />

neurasthénie. Celles-ci s’étant vus singulièrement réduit leur champ clinique, il importait d’inscrire<br />

les troubles qu’on leur avait imputé sous d’autres rubriques nosologiques.<br />

C’est ainsi que J. Roux se tourne vers l’entité conçue par E. Brissaud quelques années plus tôt,<br />

« maladie toute mo<strong>de</strong>rne » (p. 81) puisqu’elle est née avec la loi sur le droit à in<strong>de</strong>mnité pour les<br />

acci<strong>de</strong>ntés. Il la définit comme un « état mental particulier qui est la conséquence non du<br />

traumatisme lui-même, mais <strong>de</strong> ses suites légales » et qui consiste en l’« idée fixe d’obtenir<br />

réparation du dommage causé », suite à un acci<strong>de</strong>nt.<br />

L’auteur précise à plusieurs reprises qu’elle n’a rien <strong>de</strong> l’hystérie, pas plus qu’elle n’est une forme <strong>de</strong><br />

simulation, et qu’il faut la considérer comme une véritable maladie mentale s’apparentant à une<br />

1 L. Monthelie (1906) : Annales d'hygiène publique et <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine légale, série 4, N° 6, p. 477.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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