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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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questions <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir qui se posent alors à lui, mais <strong>de</strong> légitimité au regard <strong>de</strong>s valeurs et <strong>de</strong>s choix<br />

existentiels qui sont les siens.<br />

La distinction pourrait sembler quelque peu byzantine si elle ne tenait sa raison dans la nature<br />

profondément différente du <strong>travail</strong> exigé ici : ce ne sont ni les motifs qui l’ont conduit à être présent<br />

à l’événement, ni sa conduite durant celui-ci qui vont être interrogés, pas plus que sa représentation<br />

du mon<strong>de</strong> et <strong>de</strong> ce qui y contrevient, mais l’éventuelle signification <strong>de</strong> ce qui s’est produit au regard<br />

<strong>de</strong> ses engagements éthiques et moraux ; d’où l’air <strong>de</strong> parenté entre les problématiques<br />

<strong>psycho</strong>traumatiques et les <strong>psycho</strong>névroses, qui a pu faire croire qu’il en s’agissait effectivement.<br />

a) De la Réparation juridique aux Engagements existentiels<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Comment faire d’une perte un gain possible, malgré tout ? Tel est ce à quoi engage dans son<br />

principe l’in<strong>de</strong>mnisation : que le victimé évalue la nature et la gravité <strong>de</strong> son préjudice et qu’il en<br />

conçoive une équivalence compensatrice. La somme d’argent qu’il recevra n’y joue cependant qu’un<br />

rôle <strong>de</strong> médiateur car il lui faudra également déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong> son utilisation, c’est-à-dire la convertir en<br />

encore quelque chose d’autre. Il en restera cependant toujours une perte, car rien ne peut<br />

exactement remplacer ce qui a été lésé, et ce qui en outre est survenu n’en sera <strong>de</strong> toute façon<br />

jamais annulé.<br />

Certains se refusent au principe même <strong>de</strong> ce marché tant on ne peut jamais exactement savoir ce<br />

que l’on a perdu et gagné, laissant alors l’agresseur en<strong>de</strong>tté ; au moins sont-ils persuadés <strong>de</strong> ne rien<br />

<strong>de</strong>voir à personne, mais la contrepartie sera <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir trouver en eux-mêmes d’autres moyens <strong>de</strong> ne<br />

pas en rester à un vécu <strong>de</strong> perte irrémédiable, et, d’en quelque sorte, s’auto-in<strong>de</strong>mniser, c’est-à-dire<br />

trouver malgré tout matière à gain dans ce qui leur est arrivé, ce qui est très loin toujours d’aller <strong>de</strong><br />

soi. Cela reste donc là encore une affaire <strong>de</strong> choix, donc d’évaluation <strong>de</strong>s gains et <strong>de</strong>s coûts propres à<br />

chacune <strong>de</strong>s options.<br />

Ainsi, quelque soit l’option adoptée par le victimé, elle supposera toujours une mise en jeu <strong>de</strong> son<br />

économie interne, <strong>de</strong> ce qui, pour lui, fait valeurs et donc office d’étalon <strong>de</strong> ces gains et ces coûts.<br />

A la différence <strong>de</strong> la responsabilité, la relation instaurée ici par le victimé à l’événement n’est<br />

pas un rapport <strong>de</strong> cause à effet, au sens où son mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie et ses actes auraient pu jouer un rôle<br />

plus ou moins direct dans sa survenue et son déroulement. Il va par contre l’analyser au regard <strong>de</strong> ce<br />

qu’il peut lui enseigner quant à ses engagements existentiels : y a-t-il une leçon à en retirer, que peut<br />

lui dire l’événement <strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong> son existence ?<br />

Tout événement dommageable renvoie ainsi peu ou prou le sujet à une question d’économie<br />

morale conduisant à en faire la mesure <strong>de</strong> ses mérites et <strong>de</strong> ses fautes ; et l’examen auquel cela le<br />

conduit ne relève pas comme ci-<strong>de</strong>ssus d’une autocritique, mais d’un véritable examen <strong>de</strong><br />

conscience, car il n’y a <strong>de</strong> gains et <strong>de</strong> coûts <strong>psychique</strong>s que mesurés à l’aulne <strong>de</strong> ses mérites et <strong>de</strong> ses<br />

torts. Son économie personnelle s’en trouve <strong>de</strong> fait sollicitée sinon interrogée <strong>de</strong> façon critique, et<br />

l’événement se fait mesure <strong>de</strong> ses engagements existentiels et <strong>de</strong>s moyens qu’il se donne <strong>de</strong> les<br />

mener à bien : il se trouve ainsi lesté d’un ensemble <strong>de</strong> valences négatives et positives qui vont lui<br />

conférer la valeur d’une sanction (positive et/ou négative), c’est-à-dire d’un jugement <strong>de</strong> valeur.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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