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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

volonté <strong>de</strong> s’en démarquer le plus nettement possible au prorata <strong>de</strong> l’importance accordée à<br />

l’événement dans son impact et sa signification propres.<br />

Mais quelle conception développer qui, sans nier la causalité <strong>psychique</strong>, lui accor<strong>de</strong> tout son pouvoir<br />

disruptif ? L’effort théorique va consister à dégager l’impact propre <strong>de</strong> l’événement, hors toute<br />

référence à une quelconque prédétermination, qu’elle ressortisse à l’hérédité ou à l’histoire infantile.<br />

Deux lignes <strong>de</strong> pensée vont participer à cette réhabilitation<br />

La subjectivité et son pouvoir signifiant ne va pas pour autant être niée mais resituée au rang d’une<br />

vulnérabilité qui, chez L. Crocq, est <strong>de</strong> trois ordres : <strong>de</strong> constitution, <strong>de</strong> conjoncture et <strong>de</strong><br />

signification. La vulnérabilité n’a rien d’un déterminisme, elle est plutôt une sensibilité à un contexte<br />

ou à type d’événement et, si le trauma est bien l’effet d’une rencontre, elle est celle d’une personne<br />

totale en situation. C’est dire que l’événement n’y joue pas que le rôle d’un révélateur, tant il initie<br />

une véritable crise (L. Crocq, 1999) <strong>de</strong> par l’expérience vécue qu’il engendre.<br />

D’autre part, cette expérience est d’une nature à la fois unique, qui n’a pas d’équivalent sinon un<br />

autre événement traumatique, ensuite elle relève d’une véritable expérience anthropologique qui<br />

transcen<strong>de</strong> toutes les époques et les cultures, telle que la référence aux grands mythes vient<br />

l’attester.<br />

Ce qui ferait trauma est que l’expérience se dérobe à tout sens et que, nous le verrons en détail dans<br />

la partie suivante, les sens auxquels le sujet peut le raccrocher sont éminemment problématiques. A<br />

ce qui semble un excès <strong>de</strong> sens dans le trauma névrotique, fait pendant son défaut total dans la<br />

névrose traumatique. <strong>Le</strong> trauma est effondrement <strong>de</strong> notre réalité tant externe qu’interne, <strong>de</strong> ce sur<br />

quoi nous asseyons notre existence et qui se dérobe soudain à nous.<br />

Mais l’élément sans doute le plus essentiel est la rupture qu’il instaure dans la trame<br />

existentielle et surtout dans l’histoire <strong>de</strong> vie. L’événement traumatique relève d’une fracture radicale<br />

dans l’histoire <strong>de</strong> vie, ce dont s’est efforcée <strong>de</strong> rendre compte C. Malabou :<br />

Il existe <strong>de</strong>s métamorphoses qui dérangent la boule <strong>de</strong> neige que l’on forme avec soi-même dans la<br />

durée, ce gros tas circulaire bien rempli, replet, complet. D’étranges figures qui surgissent <strong>de</strong> la<br />

blessure, ou <strong>de</strong> rien, d’une sorte <strong>de</strong> décrochage d’avec l’avant, <strong>de</strong>s figures qui ne résultent ni d’un<br />

conflit infantile non réglé, ni <strong>de</strong> la pression du refoulé, ni du retour subit d’un fantôme. Il est <strong>de</strong>s<br />

transformations qui sont <strong>de</strong>s attentats. 1<br />

De l’acci<strong>de</strong>nt surgiraient ainsi « <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’être sans généalogie », <strong>de</strong>s êtres nouveaux venus<br />

« d’une tranchée profon<strong>de</strong> ouverte dans la biographie », <strong>de</strong>s êtres <strong>de</strong>venus irrémédiablement<br />

étrangers à eux-mêmes :<br />

En conséquence <strong>de</strong> graves traumatismes, parfois pour un rien, le chemin bifurque et un personnage<br />

nouveau, sans précé<strong>de</strong>nt, cohabite avec l’ancien et finit par prendre toute la place. Un personnage<br />

méconnaissable, dont le présent ne provient d’aucun passé, dont le futur n’a pas d’avenir, une<br />

improvisation existentielle absolue. 2<br />

Ainsi, la catastrophe…<br />

1 C. Malabou, Ontologie <strong>de</strong> l’acci<strong>de</strong>nt, p. 10.<br />

2 Ibi<strong>de</strong>m, p. 10.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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