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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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… inscrit, dans le cours d’une existence qui pouvait s’ignorer comme telle, un avant et un après. Une<br />

temporalité particulière et capricieuse, instable : un avant et un après, un après qui se présente<br />

toujours comme une création avant l’avant… Un avant jusqu’alors inconnu s’impose avec les<br />

certitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> ses fondations détruites. 1<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

C’est, peut-on alors penser, la structure même <strong>de</strong> la subjectivité qui se trouve affectée, et non telle<br />

ou telle subjectivité en fonction <strong>de</strong>s avatars <strong>de</strong> son ontogenèse ; c’est une mauvaise rencontre<br />

certes, mais en tant qu’elle révèle la fragilité propre à la structure <strong>psychique</strong> humaine, son<br />

impossible, sa limite même à pouvoir soutenir toute forme <strong>de</strong> subjectivé. Dans les Nouvelles<br />

conférences d’introduction à la psychanalyse (1932, p. 82-83), Freud avait comparé le psychisme au<br />

cristal qui, lorsqu’il se brise sous l’effet d’un choc, ne se casse pas <strong>de</strong> n’importe quelle façon, ses<br />

brisures suivant <strong>de</strong>s tracés certes jusqu’alors invisibles, mais prédéterminés par sa structure même.<br />

La maladie mentale serait ainsi la rencontre d’un choc acci<strong>de</strong>ntel et d’un psychisme formé <strong>de</strong> tracés<br />

secrets susceptibles <strong>de</strong> constituer <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> fracture pour ce choc. Si l’on va jusqu’au bout <strong>de</strong> ce<br />

que suggère cette image, l’on peut entendre que chaque cristal est unique dans sa forme mais obéit<br />

à une structure commune qui en fait précisément un morceau <strong>de</strong> cristal et pas <strong>de</strong> tout autre minéral.<br />

Nous sommes ici bien proches du concept <strong>de</strong> troumatisme <strong>de</strong> J. Lacan, troumatisme tenant bien plus<br />

à la structuration <strong>de</strong> l’inconscient « comme un langage », qu’aux aléas individuels <strong>de</strong> sa constitution<br />

chez chacun.<br />

Vu du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’après-coup <strong>de</strong> ce moment traumatique, il n’y aurait rien d’autre à dire que<br />

cette implosion <strong>de</strong> l’être dans le dérobement <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>meure (H. Maldiney, 1975) et dont l’on fait<br />

rétroactivement, par déduction du présent déficitaire dans lequel il laissait le sujet, un moment<br />

inaugural. Celui-ci est d’abord une fiction théorique néc<strong>essai</strong>re dont, a posteriori, il faut postuler<br />

l’existence pour rendre compte <strong>de</strong>s phénomènes <strong>psychique</strong>s observés : un être-égaré dans sa<br />

présence à lui-même, à autrui et au mon<strong>de</strong> que laisse le trauma, qui en sera, peut-être à jamais,<br />

« distordue » (L. Binswanger, 2002).<br />

C’est avec un être qui se sait <strong>de</strong>venu étranger à lui-même qu’il faudra au sujet traumatisé<br />

dorénavant faire avec. La nécessité <strong>de</strong> penser une « ontologie <strong>de</strong> l’acci<strong>de</strong>nt » tient chez C. Malabou à<br />

ce constat.<br />

1.4. <strong>Le</strong>s temps du traumatique : du moment traumatique à<br />

l’après-trauma<br />

Si nous faisons bien du hasard notre <strong>de</strong>stin, il est donc pour la pensée contemporaine <strong>de</strong>s<br />

acci<strong>de</strong>nts que nous ne parvenons pas à faire nôtres, et c’est à ceux-là qu’elle s’est particulièrement<br />

intéressée.<br />

1 L M Villerbu : Après et avant, quand la <strong>victime</strong> parle. Une clinique <strong>psycho</strong>logique dans les embarras <strong>de</strong> la<br />

<strong>victimologie</strong> et l’apport <strong>de</strong> la <strong>psycho</strong>-criminologie. Journée d’étu<strong>de</strong>, mai 2004, La Roche sur Yon, Institut<br />

Catholique d’Etu<strong>de</strong>s Supérieures.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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