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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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hystériques durables que le sujet lui-même ne parvient pas à s’expliquer et qu’il contrôle encore<br />

moins, bien qu’il souffre <strong>de</strong> leur existence.<br />

C’est l’étu<strong>de</strong> clinique d’un cas, celui d’Emma, qui sert <strong>de</strong> support à l’élaboration <strong>de</strong> cette<br />

construction ; mais l’on en trouve déjà les prémisses, voire les principes déjà affirmés, dans certains<br />

passages <strong>de</strong>s Etu<strong>de</strong>s sur l’hystérie, comme dans l’étu<strong>de</strong> D. consacrée à Katharina 1 .<br />

En 1894, Emma Eckstein commence à 27 ans une analyse avec Freud en raison <strong>de</strong> sa hantise d’entrer<br />

seule dans un magasin. Elle rattache cette hantise au souvenir <strong>de</strong> la scène suivante survenue dans sa<br />

13 ième année :<br />

Ayant pénétré dans une boutique pour y acheter quelque chose, elle aperçut les <strong>de</strong>ux ven<strong>de</strong>urs (elle<br />

se souvient <strong>de</strong> l’un d’eux) qui s’esclaffaient. Prise <strong>de</strong> panique, elle sortit précipitamment. De là l’idée<br />

que les <strong>de</strong>ux hommes s’étaient moqués <strong>de</strong> sa toilette et que l’un d’eux avait exercé sur elle une<br />

attraction sexuelle. 2<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Partant <strong>de</strong> ces premières données et suivant un raisonnement auquel les Etu<strong>de</strong>s sur l’hystérie nous<br />

ont rendu familier, Freud relève que ces éléments ne peuvent à eux seuls rendre compte <strong>de</strong>s<br />

symptômes phobiques. Il s’attache donc à rechercher une autre scène qui, selon son expérience<br />

clinique, doit présenter au moins <strong>de</strong>ux caractéristiques : être <strong>de</strong> nature sexuelle et avoir provoqué<br />

<strong>de</strong>s émotions pénibles tellement fortes que le moi a dû avoir recours à un refoulement du souvenir<br />

hors <strong>de</strong> la conscience pour se protéger <strong>de</strong> celles-ci.<br />

L’investigation clinique (Freud écrit « l’analyse met ensuite en lumière un autre souvenir… ») donne<br />

accès à un autre souvenir remontant à l’âge <strong>de</strong> 8 ans, dans lequel Emma…<br />

… était entrée <strong>de</strong>ux fois dans la boutique d’un épicier pour y acheter <strong>de</strong>s friandises et le marchand<br />

avait porté la main, à travers l’étoffe <strong>de</strong> sa robe, sur ses organes génitaux. Malgré ce premier inci<strong>de</strong>nt,<br />

elle était retournée à la boutique, puis cessa d’y aller. Par la suite, elle se reprocha d’être revenue chez<br />

ce marchand, comme si elle avait voulu provoquer un nouvel attentat. N <strong>de</strong> la P, p. 365-66).<br />

L’analyse que proposa Freud <strong>de</strong> cette séquence associative procè<strong>de</strong> <strong>de</strong> la façon suivante :<br />

- il existe un lien associatif entre les <strong>de</strong>ux, mentionné par la patiente : le rire <strong>de</strong>s commis qui<br />

lui avait rappelé l’expression <strong>de</strong> l’épicier ayant accompagné son geste. S’en ajoute un autre :<br />

dans les <strong>de</strong>ux situations elle était seule ;<br />

- l’émoi et les symptômes provoqués par la scène 1 (celle <strong>de</strong>s commis puisque<br />

chronologiquement la première dans la séance) s’expliquent par la scène 2 (celle <strong>de</strong><br />

l’épicier) ;<br />

- il existe une chaîne <strong>de</strong> représentations conscientes : commis-rires-vêtements-décharge<br />

sexuelle. Mais, dit Freud, « <strong>Le</strong> lien qui unit ces fragments d’histoire, aussi bien que les effets<br />

<strong>de</strong> l’inci<strong>de</strong>nt, restent incompréhensibles. », car il ne peut expliquer ni l’obsession liée aux<br />

magasins, ni les déterminations d’un tel symptôme ;<br />

1 Freud, en commentaire <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong>, y écrit déjà : « Dans toutes les analyses d’hystéries fondées sur <strong>de</strong>s<br />

traumatismes sexuels, on découvre que certaines impressions, reçues à l’époque présexuelle et qui n’avaient eu<br />

aucun effet sur l’enfant, conservent plus tard leur puissance traumatisante, en tant que souvenir, une fois que la<br />

jeune fille ou la jeune femme a acquis la notion <strong>de</strong> la sexualité. » (Etu<strong>de</strong>s sur l’hystérie, p. 105).<br />

2 S. Freud (1956), Naissance <strong>de</strong> la Psychanalyse, p. 364.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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