27.12.2013 Views

Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

589<br />

<strong>psycho</strong>pathologie. En effet, une abondante et riche réflexion s’est interrogée sur la nature <strong>de</strong> ce qui<br />

faisait au fond, à travers elles, limite : limites <strong>de</strong>s concepts <strong>de</strong> névrose et <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>se, limites <strong>de</strong> la<br />

cure psychanalytique traditionnelle, voire <strong>de</strong> la cure dans ses principes mêmes, limites <strong>de</strong> discours et<br />

<strong>de</strong> pratiques plus <strong>psycho</strong>logiques que véritablement analytiques, en réponse aux intimations<br />

postmo<strong>de</strong>rnes faite au sujet. Et <strong>de</strong> leur recensement, l’on peut tirer une hypothèse qui semble ne<br />

jamais avoir été soulevée, celle <strong>de</strong> la limite <strong>de</strong> la structure en tant que paradigme 1 .<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Or notre historique du « traumatique », à travers les multiples conceptions du traumatisme<br />

que l’on a pu voir s’y succé<strong>de</strong>r, s’est avéré être un révélateur particulièrement éclairant <strong>de</strong>s modèles<br />

et paradigmes en psychiatrie et en <strong>psycho</strong>pathologie. Ainsi la réflexion sur le traumatisme a toujours<br />

été au centre d’un débat dont les termes dans lesquels il se posait se sont certes transformés, mais<br />

autour d’une question qui est restée elle fondamentalement la même : celle <strong>de</strong> l’étiopathogénie<br />

prise entre <strong>de</strong>ux pôles extrêmes, celui <strong>de</strong> l’endogène et celui <strong>de</strong> l’exogène, celui <strong>de</strong>s rôles<br />

respectifs <strong>de</strong>s facteurs internes et externes dans les « désordres mentaux ».<br />

Chacun <strong>de</strong>s grands modèles qu’a pu connaître la <strong>psycho</strong>pathologie a eu d’une façon ou d’une autre à<br />

répondre <strong>de</strong> cette dualité explicative et en a traité selon ce que ses modalités propres permettaient<br />

d’en dire et d’en élaborer. Facteurs endogènes et exogènes, quelque soient les modélisations qui en<br />

aient été proposées, se sont ainsi diversement combinés et ont joué <strong>de</strong>s rôles plus ou moins<br />

déterminants, en proportion presque exactement inverse. Que ce soit la théorie <strong>de</strong> la<br />

dégénérescence, celle <strong>de</strong>s constitutions ou encore celle <strong>de</strong>s structures, quoique dans <strong>de</strong>s termes très<br />

différents, ont été traversées par ces <strong>de</strong>ux épistémès : déterminisme d’un côté, acci<strong>de</strong>nt ou hasard<br />

<strong>de</strong> l’autre. L’on a vu qu’il en était ainsi <strong>de</strong> la dégénérescence qui a produit d’un côté Morel et <strong>de</strong><br />

l’autre Magnan, le premier en faisant un processus réversible, l’autre une prédétermination qu’il<br />

était totalement vain <strong>de</strong> tenter d’infléchir. Cette même dualité se retrouve au sein <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s<br />

constitutions où Kretschmer tient une position proche <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> Morel, et Dupré <strong>de</strong> celle <strong>de</strong><br />

Magnan (G. Lantéri-Laura, 1991). Quant à psychanalyse, bien qu’elle ait mis avant <strong>de</strong>s facteurs<br />

propres à l’histoire singulière <strong>de</strong> chacun, elle continue malgré tout <strong>de</strong> faire jouer un rôle important à<br />

la constitution, dans la mesure où le pouvoir traumatique <strong>de</strong> l’événement ne l’est que relativement à<br />

un psychisme donné. De même, chez Lacan, le trauma est l’effet d’une « mauvaise rencontre », celle<br />

d’une structure confrontée à son impossible sous la forme d’un événement qui en actualise les failles<br />

constitutives.<br />

A l’opposé, la <strong>psycho</strong>traumatologie contemporaine a élaboré sa propre conception du trauma en en<br />

sensiblement déplaçant les enjeux, puisqu’elle s’est centrée sur l’impact propre <strong>de</strong>s événements et<br />

ce faisant a secondarisé la prédisposition pour en faire tout au plus une « vulnérabilité » ; et il n’est<br />

<strong>de</strong> ce point <strong>de</strong> vue pas fortuit qu’elle ait commencé, en s’appuyant sur la notion <strong>de</strong> névrose<br />

traumatique, à se penser contre le déterminisme <strong>psycho</strong>névrotique freudien <strong>de</strong> l’après-coup.<br />

Si la nature et le rôle respectifs <strong>de</strong> ce qui fait prédétermination et <strong>de</strong> ce qui fait acci<strong>de</strong>nt sont<br />

profondément différents d’un modèle à l’autre, ils forment cependant <strong>de</strong>ux axes fondamentaux<br />

autour <strong>de</strong>squels s’ordonnent les constructions du trauma.<br />

1 L’on pensera aux travaux <strong>de</strong> J.-J. Rassial (1999), si ce n’est qu’il ne met pas globalement en question le<br />

paradigme structural.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!