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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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L’Autre désigne chez Lacan le lieu du langage, ce qu’il appelle par ailleurs l’ordre symbolique. La tache<br />

inconsciente du sujet sera celle d’inscrire le trauma dans l’Autre du langage pour lui conférer une<br />

signification, quitte à ce que cela nécessite la formation d’un symptôme.<br />

La part du trauma qui échappe au sens, c’est le fantasme qui aura notamment pour fonction <strong>de</strong> le<br />

cadrer. Et lorsque le fantasme ne parvient plus à régler le rapport à l’objet <strong>de</strong> jouissance, c’est<br />

l’angoisse qui apparaît. 1<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

De cette opération il subsistera toujours un reste, à savoir ce qui du réel résiste, et ne peut que<br />

résister au symbolique, puisqu’il qui tient à l’impropriété structurelle du langage : le symbolique<br />

étant un « meurtre <strong>de</strong> la chose » nous ne pouvons plus revenir à elle que dans le rapport médiatisé<br />

qu’instaure le langage. Il ne saurait ainsi exister <strong>de</strong> « rapport réel au réel » sans le langage (C.<br />

Hoffmann, 2007, p. 35-46). <strong>Le</strong> langage est en effet tout autre chose qu’une opération <strong>de</strong> désignation,<br />

un signifiant correspondant <strong>de</strong> façon univoque à un signifié. Ce que Lacan a retenu <strong>de</strong> la linguistique<br />

saussurienne est sa dimension structurale selon laquelle il n’existe plus aucune positivité : il est accès<br />

à une rationalité autre, à une abstraction, si bien qu’il nous contraint à la fois à l’impropriété, donc au<br />

malentendu, ainsi qu’à la polysémie puisqu’un signifiant n’a <strong>de</strong> réalité que dans son opposition à<br />

d’autres signifiants.<br />

<strong>Le</strong> Réel est alors ce qui résiste à toute symbolisation. Ce que nous croyons pouvoir en saisir est en<br />

fait <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> la « réalité », c’est-à-dire <strong>de</strong> ce que l’opération du langage nous permet <strong>de</strong> nous en<br />

représenter. Quant au fantasme, il tente <strong>de</strong> recréer un lien à l’objet perdu dans une sorte <strong>de</strong> fonction<br />

« anti-traumatique » puisqu’il s’efforce <strong>de</strong> combler, sans pouvoir jamais y parvenir totalement,<br />

quelque chose <strong>de</strong> la division inaugurale du sujet qui le fait sujet <strong>de</strong> manque.<br />

Comme chez Freud, c’est la rencontre première avec le sexuel qui est traumatique, en raison<br />

<strong>de</strong> son caractère d’abord énigmatique pour l’enfant, si bien que cette rencontre le laisse confronté<br />

avec trois énigmes : le désir <strong>de</strong> l’Autre, l’irruption <strong>de</strong> sa propre jouissance et l’irréductibilité <strong>de</strong> cette<br />

expérience au langage. Cette découverte est source d’une expérience <strong>de</strong> jouissance qui ne trouve<br />

pas dans l’ « Autre du langage » un signifiant à sa mesure, et il en restera toujours une part d’énigme.<br />

C’est cette inscription inaugurale impossible qui fait le traumatisme lacanien, ou, plus exactement, le<br />

« troumatisme », parce qu’il introduit dans le réel <strong>de</strong>s catégories <strong>de</strong> sens qui en rompent le caractère<br />

par essence informe, « sans loi » (J. Lacan, 2005). Mais ce réel se dérobera toujours partiellement à<br />

se laisser signifier par l’ordre symbolique puisqu’il est ce qu’il en reste d’inaccessible, par le fait<br />

même <strong>de</strong> la structure. C’est là l’origine <strong>de</strong> la répétition puisque le sujet se trouve condamné à<br />

« l’ordre d’un désir » réduit à se satisfaire <strong>de</strong> « l’objet a », sorte <strong>de</strong> substitut au désir <strong>de</strong> l’Autre, et<br />

qui le conduit d’objet en objet, puisque chacun d’entre eux ne peut dès lors être que marqué du<br />

sceau du « manque » : le propre du désir est d’être toujours insatisfait : « Par conséquent, nous<br />

pouvons reconnaître que l’objet du désir n’est que le manque qui le cause, et qui lui donne sa<br />

vérité » (C. Hoffmann, 2007, p. 44-45).<br />

Parce que le langage est impropre à tout signifier, il introduit donc à une schize fondatrice (le sujet<br />

est irrémédiablement divisé) qui fait accé<strong>de</strong>r le sujet à la castration, à la cause (il n’est d’objet que<br />

causé) au ratage, au malentendu, à la séparation, au discours, au manque donc au désir (qui est dès<br />

lors « toujours désir d’autre chose »), etc. Dans ce système, le troumatisme est constitutif <strong>de</strong> l’accès<br />

1 S. Maugeri : <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> du traumatisme.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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