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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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b) <strong>Le</strong>s problématiques victimales TYPE 4 et le syndrome victimal du défilement perpétuel<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

L’on a affaire ici à une mise en scène à la recherche <strong>de</strong> ses personnages, ou un récit à la<br />

recherche <strong>de</strong> ses éléments narratifs. Une globalité fonctionne mais elle ne tient pas sa consistance<br />

d’une cohérence interne ; ou encore, un récit se dévi<strong>de</strong> sans véritable début ni fin, un récit à la quête<br />

<strong>de</strong> sa trame dramatique, une narration sans fil directeur ou sans propos, sans histoire en quelque<br />

sorte, comme un défilement ou une bobine se dévidant. La mise en récit échoue ici à mettre les<br />

éléments en scène et la scène en une dramatique. <strong>Le</strong>s éléments se récapitulent en un mouvement <strong>de</strong><br />

déroulement sans fin, donna lieu à <strong>de</strong>s récits factuels car il y manque un propos, ou une trame, qui<br />

lui donnerait orientation, sens, et dont la carence fait que l’on ne sait pas véritablement <strong>de</strong> quoi au<br />

fond parle le sujet.<br />

Une forme <strong>de</strong> récit tout à fait caractéristique se donne alors à entendre, sans véritable début ni fin<br />

puisque sans fil directeur, comme celui-ci qui n’a malheureusement pu être noté : la patiente, dès les<br />

premiers instants du premier entretien, comme si le cadre <strong>de</strong> la rencontre et son interlocuteur<br />

étaient eux aussi indifférents et comme si elle poursuivait un monologue, sans présentation ni<br />

explicitation d’une quelconque <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, commence son récit la veille du jour où elle est agressée<br />

sexuellement et poursuit celui-ci jusqu’à celle <strong>de</strong> l’entretien 15 jours plus tard, sur le même ton<br />

monocor<strong>de</strong> ; et l’agression, mentionnée au passage, ne ressort pas comme un événement plus<br />

notable qu’un autre. A l’entretien suivant, son récit débute, l’on ne comprend pas également<br />

pourquoi, trois jours plus tôt que la fois précé<strong>de</strong>nte, et intègre <strong>de</strong>s événements survenus <strong>de</strong>puis le<br />

premier entretien, les détails s’ajoutant aux détails sans que l’on ne sache ce qu’ils viennent relater.<br />

Exemple n° 28<br />

C’est l’exemple <strong>de</strong> cette femme proche <strong>de</strong> la cinquantaine. Elle traverse un grave état<br />

diagnostiqué <strong>de</strong> dépressif qui a justifié une hospitalisation en milieu spécialisé. <strong>Le</strong>s entretiens<br />

<strong>psycho</strong>logiques qui lui sont proposés dans ce cadre laissent rapi<strong>de</strong>ment à penser que son état<br />

est en partie lié à <strong>de</strong>s difficultés conjugales croissantes, en partie liée à une enfance à laquelle<br />

elle dit n’avoir jamais cessé <strong>de</strong> penser toute sa vie, et à laquelle elle attribue non seulement ses<br />

difficultés actuelles mais aussi un mal être <strong>de</strong> fond très ancien.<br />

De cette enfance elle ne « sait trop quoi en penser », et c’est précisément ce peu <strong>de</strong><br />

consistance qui semble expliquer son caractère omniprésent. De ce qu’elle parvient<br />

progressivement à en relater, il ne ressort à proprement parler pas d’événements<br />

véritablement traumatiques ou <strong>de</strong> rupture, mais plutôt l’impression d’un arrière-plan, d’une<br />

trame dont le caractère pesant et obsédant tient à ce qu’elle ne se laisse justement que<br />

difficilement appréhen<strong>de</strong>r par <strong>de</strong>s mots, mais qui prend consistance au fil <strong>de</strong>s entretiens : <strong>de</strong>s<br />

disputes avec violences verbales entre ses parents, l’amant <strong>de</strong> sa mère qui vient à la maison<br />

dès que son père s’absente quelques heures, les baisers entre cet homme et sa mère surpris<br />

par elle entre <strong>de</strong>ux portes, les <strong>de</strong>ux amants l’un sur l’autre dans un lit, la hantise que ses jeunes<br />

frères ne surprennent <strong>de</strong> telles scènes et les multiples précautions qu’elle doit prendre pour les<br />

en protéger, l’appréhension quotidienne lorsqu’elle rentre <strong>de</strong> l’école <strong>de</strong> ce qu’elle pourrait<br />

voir, la conviction que son père connaissait parfaitement la situation, l’incompréhension totale<br />

qu’il puisse l’accepter... Autant d’éléments qui continuent <strong>de</strong> la plonger dans un grand malaise,<br />

sans qu’elle ne comprenne en quoi et pourquoi.<br />

C’est le contexte quotidien <strong>de</strong> sa vie d’enfant, comme les éléments d’un décor<br />

incompréhensible dans lequel elle se meut, qui reste encore aujourd’hui toujours aussi<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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