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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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Exemple n° 25<br />

Se peut-il qu’il existe <strong>de</strong>s images traumatiques négatives, comme il y a <strong>de</strong>s hallucinations<br />

négatives ? C’est ce que laisse à penser l’exemple suivant.<br />

Il s’agit d’une femme employée <strong>de</strong> banque qui est <strong>victime</strong> voici quelques mois d’un braquage à<br />

main armée. Elle est au guichet et c’est elle qui est chargée d’appuyer sur le bouton<br />

permettant aux clients d’entrer et <strong>de</strong> sortir du sas <strong>de</strong> sécurité. Actionnant <strong>de</strong> façon<br />

automatique les portes, elle n’a pas prêté attention à qui elle laissait entrer, ce qui lui sera<br />

d’autant plus reproché que les <strong>de</strong>ux braqueurs étaient postichés et qu’elle aurait dû, selon son<br />

directeur, les repérer. Elle se retrouve face à un premier homme qui braque une arme sur elle<br />

et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> laisser entrer un second homme resté à l’extérieur. Ce <strong>de</strong>rnier entre, et elle<br />

ne sait pas pourquoi, elle reste le regard fixé sur ses mains qui portent <strong>de</strong>s gants en latex noir.<br />

Elle n’a pas vu son visage qui pourtant, selon la police, était découvert.<br />

Elle gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux images très fortes du braquage qui lui reviennent sans cesse sous forme <strong>de</strong><br />

flashes : les mains gantées <strong>de</strong> l’un, le visage postiché <strong>de</strong> l’autre avec sa perruque et sa fausse<br />

moustache, mais les cauchemars qu’elle fera pendant plusieurs semaines auront tous pour<br />

thème un homme sans tête.<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

Exemple n°26<br />

Il s’agit d’une infirmière. La tension monte <strong>de</strong>puis plusieurs heures avec une patiente qui<br />

semble l’avoir prise comme « mauvais objet » et est <strong>de</strong> plus en plus agressive à son égard. A<br />

l’occasion d’un refus qu’elle doit opposer à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la patiente <strong>de</strong> sortir hors <strong>de</strong> l’unité<br />

sans autorisation médicale, la tension a augmenté d’un cran. L’infirmière continue néanmoins<br />

son <strong>travail</strong> et, une heure après, alors qu’elle se trouve au but d’un couloir, elle voit la patiente<br />

arriver en courant <strong>de</strong> l’autre bout, le visage déformé par la colère. Elle se rue sur l’infirmière et,<br />

toute proche d’elle, tend ses mains vers son cou en hurlant « je vais l’étrangler, je vais la<br />

tuer ! » Après, dit l’infirmière « plus rien, j’ai plus rien enregistré, y’a eu arrêt sur image ». Et<br />

c’est ce visage hurlant et les mains tendues vers son cou qui lui reviennent <strong>de</strong>puis par flashes<br />

plusieurs fois par jour <strong>de</strong>puis.<br />

Elle tentera prématurément <strong>de</strong> reprendre le <strong>travail</strong> et, revoyant le couloir où s’est produite<br />

l’agression, elle est prise <strong>de</strong> panique et doit quitter les lieux immédiatement.<br />

Exemple n° 27<br />

Nous reviendrons ultérieurement plus en détail sur cette situation présentée par une jeune<br />

femme, <strong>victime</strong> d’un acci<strong>de</strong>nt où elle a vu la roue d’un tracteur lui passer sur le pied.<br />

Hospitalisée en urgence et opérée quelques jours après, elle se retrouve en service <strong>de</strong> soins<br />

postopératoires où on lui change son pansement quotidiennement. Elle semble, au récit<br />

qu’elle fait <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>, être restée plusieurs semaines en état <strong>de</strong> choc, baignant dans un<br />

sentiment d’irréalité. Chaque matin, au changement <strong>de</strong> pansement, elle <strong>de</strong>meure sidérée et<br />

fascinée par l’état <strong>de</strong> son pied et en prend plusieurs photos avec son téléphone portable pour,<br />

dit-elle, « pouvoir être sûre plus tard que c’est bien arrivé ».<br />

Il semble ici que la photographie vienne jouer la fonction d’une « image traumatique » qui ne<br />

peut encore se constituer sans le recours d’une image réelle ayant fixé ce qui représente pour<br />

elle le summum <strong>de</strong> l’horreur et du caractère totalement irréel <strong>de</strong> ce qu’elle vit.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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