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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

pourrait imaginer d’emblée acquise comme évi<strong>de</strong>nte, mais qui est parfois l’objet <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

confusions et dont le questionnement patient permet une progressive reconstitution aux effets<br />

structurants.<br />

Cela vaut également pour la dimension émotionnelle, particulièrement valorisée dans le débriefing<br />

« à la française » avec son invitation réitérée à exprimer, en plus <strong>de</strong>s faits et <strong>de</strong>s pensées, les<br />

émotions éprouvées, ce que implique <strong>de</strong> les reconnaître et <strong>de</strong> les différencier les unes <strong>de</strong>s autres.<br />

Celles-ci renvoient à un registre affectif ou « climatique », ou encore pathique <strong>de</strong> l’événement, à une<br />

ambiance, avec ses moments <strong>de</strong> stase, <strong>de</strong> précipitation, <strong>de</strong> changements brusques…<br />

Il convient également <strong>de</strong> distinguer cet univers émotionnel <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s sensations qui renvoient,<br />

elles, à un registre encore différent, celui <strong>de</strong>s éprouvés corporels, avec les modalités expérientielles<br />

propres à chacun <strong>de</strong>s sens impliqués : mon<strong>de</strong> du toucher, <strong>de</strong> l’ouïe, du voir, <strong>de</strong> l’odorat, du goût,<br />

comme autant <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> présence distincts revoyant à <strong>de</strong>s formes d’expériences impliquant leur<br />

phénoménologie propre (E. Minkowski, 1936). Il faudrait ici se référer à toute l’œuvre <strong>de</strong> G.<br />

Bachelard relative aux quatre éléments et leur poétique propre, à G. Durand (1969) et ses<br />

« structures anthropologiques <strong>de</strong> l’imaginaire », ainsi qu’à à l’ensemble <strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> L. Binswanger<br />

avec son « analytique existentielle ».<br />

Ce sont donc les mo<strong>de</strong>s singuliers <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssaisissement ou d’égarement <strong>de</strong> la présence au<br />

mon<strong>de</strong>, à soi et à autrui qu’il s’agit d’appréhen<strong>de</strong>r à partir <strong>de</strong>s dimensions anthropologiques<br />

engagées par l’expérience <strong>de</strong> l’événement.<br />

b) Un réel à constituer<br />

S’il y a bien, dans toutes les pratiques <strong>de</strong> narration sollicitées sur les principes du débriefing,<br />

exigence d’élaboration d’un récit, la nature <strong>de</strong> celui-ci y est tout à fait singulière au sens où elle est<br />

sensiblement éloignée <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> récit ou d’expression verbale attendues dans les autres<br />

pratiques cliniques ; le récit doit y obéir à certaines règles qui font qu’il ne doit être ni fiction, ni<br />

associations, ni rêverie, ni construction d’une utopie (comme elle est sollicitée dans l’épreuve du<br />

Village imaginaire ( L.M. Villerbu, 1993))…<br />

L’on trouve ainsi dans tout débriefing, ou métho<strong>de</strong> apparentée, une exigence commune qui en est<br />

l’une <strong>de</strong>s marques distinctives : car que la métho<strong>de</strong> insiste sur les aspects émotionnels, cognitifs,<br />

factuels ou autres, dans tous les cas, un même impératif implicite s’impose, une même contrainte s’y<br />

trouve à l‘œuvre, celle <strong>de</strong> créer un récit circonstancié aussi complet (concernant le ou les registre(s)<br />

sollicité(s)) que possible <strong>de</strong> l’événement.<br />

Il y a là un point <strong>de</strong> butée, une sorte <strong>de</strong> réel auquel le récit s’ancre et revient sans cesse :<br />

l’événement, même indicible. C’est à sa constitution, même au travers <strong>de</strong> l’expression <strong>de</strong>s éprouvés<br />

les plus personnel, que tout son déroulement tend. L’événement n’est pas qu’un prétexte, un point<br />

<strong>de</strong> départ ou un support invitant le sujet à imaginer, associer, exprimer son univers personnel : il est<br />

ce qu’il faut concevoir et mettre en forme.<br />

L’on aurait cependant tort d’y voir la recherche d’une <strong>de</strong>scription objectivante ou d’une sorte <strong>de</strong><br />

version officielle désubjectivée ou purement factuelle <strong>de</strong> l’événement, même quand elle vise une<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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