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Le travail psychique de victime: essai de psycho-victimologie

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le <strong>travail</strong> du pardon, nous ont laissé entrevoir quelle était la nature et certaines <strong>de</strong>s formes que<br />

pouvait prendre ce <strong>travail</strong>, ainsi que les processus <strong>psychique</strong>s susceptibles d’y contribuer.<br />

Ce sont eux que nous allons maintenant détailler en nous efforçant <strong>de</strong> les rapporter à ce qui fait le<br />

propre <strong>de</strong> ce <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong>, à savoir quatre dilemmes essentiels.<br />

2.3.1. Un <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> à <strong>de</strong>ux versants<br />

tel-00658758, version 1 - 11 Jan 2012<br />

L’on pourrait penser qu’il existe <strong>de</strong>s étayages et <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> défense internes et externes<br />

fonctionnant <strong>de</strong> façon relativement voire totalement indépendants les uns <strong>de</strong>s autres, les uns<br />

œuvrant au rétablissement <strong>psychique</strong>, et les autres au rétablissement social du sujet traumatisé.<br />

Pourtant, une analyse <strong>de</strong> contenu <strong>de</strong>s propos et <strong>de</strong>s préoccupations spontanément exprimés par la<br />

très gran<strong>de</strong> majorité (sinon <strong>de</strong> la totalité) d’entre eux fait apparaître que cette dualité ne trouve pas<br />

son fon<strong>de</strong>ment dans la clinique mais tient à <strong>de</strong>s postulats théoriques et <strong>de</strong>s options thérapeutiques<br />

ayant dichotomisé la question entre réalité interne, fantasmatique dans sa nature, et réalité externe<br />

objective, sinon objectivante.<br />

Cette analyse montre en effet que l’une et l’autre ne sont que les <strong>de</strong>ux faces d’un seul et même<br />

processus dont l’objet est chez le victimé l’<strong>essai</strong> <strong>de</strong> constitution <strong>de</strong> sa présence à l’événement et à<br />

ses retombées. C’est ce qu’attestent les multiples interrogations spontanées qui font une part<br />

importante (sinon l’essentiel) <strong>de</strong> la rencontre avec les victimés, questions lancinantes, d’autant plus<br />

répétitives qu’elles ne trouvent que très difficilement réponses, ou dont le caractère instable fait que<br />

le moindre événement ou la moindre remarque peut les balayer en un instant. Elles sont autant <strong>de</strong><br />

déclinaisons d’une question qui les con<strong>de</strong>nse toutes, pourquoi ? Pourquoi moi ? Qu’ai-je fait ? Que<br />

n’ai-je pas fait ? Pourquoi a-t-il fait ça ? Est-il fou ? Suis-je fou ? Est-il pervers ? A quoi sert la prison ?<br />

Va-t-il être condamné ? Va-t-on me croire ? Je ne veux pas <strong>de</strong> son argent. C’est sa parole contre la<br />

mienne… Autant d’interrogations dont la parenté avec les enjeux <strong>de</strong> toute procédure judiciaire ne<br />

peuvent que frapper le praticien, ce d’autant plus que les réponses qu’elle y apporte ne suffisent pas<br />

toujours, loin <strong>de</strong> là, à y répondre. Que les victimés soient si sensibles au processus judiciaire, à l’affût<br />

<strong>de</strong> ses moindres mouvements, qu’ils puissent parfois si violemment réagir à certaines <strong>de</strong> ses<br />

procédures comme à ses décisions, laisse à penser que se joue à travers lui bien plus qu’une seule<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> justice.<br />

Et l’on n’est pas loin <strong>de</strong> penser que la scène judiciaire a tout d’une scène projective, que le rapport<br />

qu’instaure à elle le victimé va souvent très au-<strong>de</strong>là du seul souci <strong>de</strong> défense <strong>de</strong> ses droits, tant il<br />

peut y être à l’affût <strong>de</strong> tout ce qui peut faire échos négatifs et positifs à ses propres doutes et<br />

certitu<strong>de</strong>s : tout laisse à penser qu’il s’en saisit comme d’une surface <strong>de</strong> mise en jeu <strong>de</strong> ses propres<br />

mouvements <strong>psychique</strong>s ; mais que, plus encore, elle lui permet <strong>de</strong> leur donne forme, corps espace<br />

et temps à l’instar d’une scène « exutoire ».<br />

D’où l’hypothèse d’une première approximation possible du TPV à partir d’une analyse <strong>de</strong> la<br />

procédure judiciaire et <strong>de</strong> ses enjeux : car si elle est autant investie, c’est qu’elle est susceptible <strong>de</strong><br />

nous dire quelque chose <strong>de</strong> tout ce qui occupe et peut envahir tant sur un mo<strong>de</strong> problématique, le<br />

sujet victimé.<br />

Pignol, Pascal. <strong>Le</strong> <strong>travail</strong> <strong>psychique</strong> <strong>de</strong> <strong>victime</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>psycho</strong>-<strong>victimologie</strong> - 2011

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