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La généalogie de l'espace comme "champ de bataille ... - Archipel

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acisme, le colonialisme et l'empire dans le <strong>champ</strong> disciplinaire <strong>de</strong>s Relations<br />

internationales aux États-Unis après 1945 33 .<br />

33 On a peu fait état ou on ne s'est souvent même pas rendu compte dans le <strong>champ</strong> disciplinaire <strong>de</strong>s<br />

Relations internationales aux États-Unis que <strong>de</strong>s rencontres impériales a surgi une immigration<br />

considérable pour les États-Unis et que la politique étrangère américaine a joué un rôle central dans cette<br />

entreprise néocoloniale (Doty, 1998). Roxanne Lynn Doty a pu montrer dans une étu<strong>de</strong> pionnière,<br />

Imperial Encounters, le malaise <strong>de</strong>s chercheurs américains en Relations internationales pour la pério<strong>de</strong><br />

1898-1945 à évoquer cet épiso<strong>de</strong> qui a vraiment insufflé au projet i<strong>de</strong>ntitaire national américain une<br />

vigueur et l'a orienté selon les lignes tracées par l'impérialisme et le colonialisme. C'est fondamental <strong>de</strong><br />

relier les catégories internes du genre, <strong>de</strong> la race et <strong>de</strong> l'ethnicité aux dynamiques globales <strong>de</strong> la<br />

construction impériale, parce que l'impérialisme (<strong>comme</strong> processus politique et économique) ne peut être<br />

séparé <strong>de</strong>s relations sociales et <strong>de</strong>s discours sur la race, le genre, l'ethnicité et la classe au sein <strong>de</strong> la<br />

nation. En ce sens, l'impérialisme américain a été accompli d'une façon telle que la race, la culture et la<br />

nation soient vues <strong>comme</strong> unifiées, <strong>comme</strong> si les frontières étaient toutes les mêmes. Les connections<br />

entre race/ethnicité et l'appartenance nationale doivent être comprises <strong>comme</strong> <strong>de</strong>s « relations<br />

d'intérieur/extérieur» qui ont lieu dans les espaces <strong>de</strong> la culture et <strong>de</strong> la nation, dans une politique <strong>de</strong> la<br />

différence (Lopez 2004). Nous croyons par conséquent qu'il faudrait repenser le développement <strong>de</strong> la<br />

discipline <strong>de</strong>s Relations internationales aux États-Unis à la lumière <strong>de</strong> ce régime gouvernemental <strong>de</strong><br />

sécurité nationale, dans une conception foucauldienne du lien savoir/pouvoir qui voit le développement<br />

du <strong>champ</strong> disciplinaire <strong>de</strong>s Relations internationales aux États-Unis <strong>comme</strong> étant partie prenant du projet<br />

colonialiste américain, particulièrement après 1945, alors que les Relations internationales sont <strong>de</strong>venues<br />

leur site subalterne (certains parlant même <strong>de</strong> 1'« empire américain <strong>de</strong>s Relations internationales», une<br />

idée bien mise en valeur dans l'interprétation postcoloniale <strong>de</strong> Leong Yew (2004) intitulée The<br />

Disjunctive Empire of International Relations), où ils ont pu aller <strong>de</strong> l'avant en pensant que l'héritage<br />

colonialiste et <strong>de</strong> la suprématie blanche dans les affaires stratégiques pourraient être passés sous silence (à<br />

travers l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s « area studies notamment») (voir Robert Vitalis, 2000, 2006a et 2006b). Les « area<br />

studies» consistent en l'étu<strong>de</strong> universitaire <strong>de</strong>s zones jugées critiques pour la sécurité nationale<br />

américaine, les « États affaissés» d'aujourd'hui et les « pays sous-développés» durant la guerre froi<strong>de</strong><br />

(Stoler (avec David Bond), 2006c : 96). Dans son chapitre « Birth of a Discipline» (Vitalis, 2006a: 159­<br />

182), qui réécrit l'histoire disciplinaire <strong>de</strong>s Relations internationales aux États-Unis, Robert Vitalis<br />

explique à quel point le lien entre développement, colonialisme et politique étrangère a été présent dès les<br />

origines <strong>de</strong> la «science politique » américaine. En effet, au début du XX e siècle, sur un fond <strong>de</strong><br />

darwinisme social, alors que la science politique et les Relations internationales ne sont encore que <strong>de</strong>s<br />

idées avant d'être <strong>de</strong>s disciplines en bonne et due forme, <strong>de</strong>s considérations racialistes <strong>de</strong><br />

« développement» pour <strong>de</strong>s peuples « arriérés» se trouvent en parallèle, voire au cœur même, du projet<br />

civilisationnel <strong>de</strong> l'impérialisme progressiste américain promu par le prési<strong>de</strong>nt Theodore Roosevelt<br />

(Williams, 1980; Go, 2003; Kramer, 2006; Kaplan, 2005). À cette époque, la distinction entre l'intérieur<br />

et l'extérieur <strong>de</strong> <strong>l'espace</strong> compris <strong>comme</strong> national n'est pas tant fait sur la base territoriale que sur la base<br />

biologique (Vitalis, 2002 : 14). Le problème racial et raciste américain était sous-jacent et <strong>de</strong>vait être mis<br />

en relation avec le contexte global (Home, 2003 : 45). Les anthropologues, les spécialistes <strong>de</strong>s sciences<br />

sociales <strong>de</strong> l'heure, relient ainsi la race au niveau <strong>de</strong> développement et <strong>de</strong> prospérité/pauvreté et en font<br />

un objet <strong>de</strong> recherche majeur avec le numéro inaugural <strong>de</strong> 1910 <strong>de</strong> la revue Journal of Race<br />

Development. L'approche pragmatique et scientiste par résolution <strong>de</strong> problèmes qu'on connaît aux<br />

Relations internationales américaines en tirent d'ailleurs là ses origines. En effet, le Journal of Race<br />

Development verra son nom changer en 1919 pour <strong>de</strong>venir le Journal of International Relations pour<br />

ensuite adopter celui <strong>de</strong> Foreign Affairs, le journal publié sous la supervision du prestigieux et toujours<br />

très influent think tank <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> New York, le Council on Foreign Relations (Vitalis, 2002: 13;<br />

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