tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

IWAN GILKIN 293
cide avec un mouvement de mœurs que les journaux caractérisent
par cette nouvelle : on constate en 1914 pour la
première fois que la majorité des familles françaises n'a
qu'un enfant.
Ainsi la restriction de la natalité, qui depuis plusieurs
années arrache des cris d'alarmes aux économistes et aux
politiques les plus clairvoyants, loin de s'atténuer, s'intensifie.
Naguère on s'effarait de voir la France s'acheminer
vers le type de la famille à deux enfants ; et voici que
tout d'un coup on découvre que c'est la famille à l'enfant
unique qui devaient le type prédominant, — puisqu'il forme
déjà la majorité des familles françaises !
Ce n'est pas à tort que l'on s'effraie, car si ce type doit
se généraliser on verra de génération en génération, c'està-dire
de trente en trente ans environ, la population française
tomber de moité ; de 40 millions d'âmes qu'elle comprend
aujourd'hui, elle descendra en trente ans à 20 millions,
en soixante ans à 10 millions, en quatre vingt dix ans
à 5 millions ! Comprenez-vous, devant ces chiffres, la foudroyante
dépopulation du vieil Empire romain?... Cette
population, il est vrai, recevait de continuels renforts par
l'infiltration des barbares. De même, la France recevra
une abondante infiltration d'Allemands, de Belges, d'Italiens
et d'Espagnols. Cette infiltration a déjà commencé ;
elle ira nécessairement en croissant.
La dépopulation de l'Italie inquiétait le gouvernement
romain dès la constitution de l'Empire. Auguste
fit des lois pour favoriser le mariage et réprimer les mauvaises
mœurs. Les historiens nous ont conservé le discours
plein d'emportement qu'il adressa aux chevaliers romains.
Les célibataires, disait-il, étaient les pires criminels, des
meurtriers, des impies, des destructeurs de leur race. Les
chevaliers attendaient-ils, comme dans la fable, des hommes
surgissant du sol pour les remplacer? Tandis que le
gouvernement libérait des esclaves pour maintenir le nombre
des citoyens, les enfants des Marcius, les Fabius, des