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tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

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ARTHUR DE RUDDER 63<br />

siècles, <strong>de</strong>s voûtes banales, <strong>de</strong>s statues plus vulgaires<br />

encore, voilà <strong>de</strong> quels éléments peu artistiques s'ornent<br />

ces tombeaux. Les successeurs <strong>de</strong> Philippe II n'ont su conserver<br />

le sens un peu emphatique qu'il possédait du pouvoir<br />

royal ni la piété ar<strong>de</strong>nte qui le faisait incliner <strong>de</strong>vant<br />

une majesté supérieure à la sienne. Ces interminables galeries<br />

uniformément blanches donnent une impression d'ennui.<br />

On pense à s'éva<strong>de</strong>r vers les jardins magnifiques<br />

qu'on aperçoit par un trou <strong>de</strong> lumière, car l'Escurial est<br />

double <strong>de</strong> sa nature : il est cloître et il est palais.<br />

L'aile droite <strong>de</strong> l'édifice est le véritable palais où les<br />

rois d'Espagne vinrent chercher un repaire loin <strong>de</strong> Madrid,<br />

la capitale sans ombre et sans solitu<strong>de</strong>. Des salles,<br />

<strong>de</strong>s salles encore qu'on dirait se succé<strong>de</strong>r à l'infini, car<br />

l'Escurial est une construction immense qui étend dans<br />

la plaine ari<strong>de</strong> son quadrilatère <strong>de</strong> pierre, enclos <strong>de</strong> jardins<br />

et d'étangs. Mais combien ses appartements sont<br />

différents <strong>de</strong>s autres ! Quel luxe éclatant, comme si les<br />

rois mo<strong>de</strong>rnes avaient voulu chasser <strong>de</strong> la somptueuse <strong>de</strong>meure<br />

qu'ils s'étaient choisie toutes traces d'austérité.<br />

Ici, ce n'est plus le Gréco, peintre mystique, qui domine,<br />

c'est Goya, le Goya <strong>de</strong>s caprices, ce Watteau espagnol,<br />

qui règne en maître. Des tapisseries dont il fit les contours<br />

font vivre tout un peuple <strong>de</strong> paysans et <strong>de</strong> paysannes folâtrant.<br />

C'est l'anecdote réalisée. Les nouvelles <strong>de</strong> Cervantes<br />

traduites en belles couleurs, les jeux populaires d'une<br />

Espagne menue et charmante, qui 'n'est point celle <strong>de</strong>s<br />

Corridas, qui n'est pas non plus celle du réalisme ou <strong>de</strong>s<br />

mysticités, une Espagne aux nuances rosées, toute <strong>de</strong> grâce<br />

aimable et <strong>de</strong> folies. Goya et le Gréco sont les maîtres <strong>de</strong><br />

l'Escurial, et par eux, plus encore par ses architectures<br />

peut-être s'explique le sens <strong>de</strong> l'édifice et son histoire,<br />

l'austérité <strong>de</strong> son fondateur, la frivolité <strong>de</strong>s rois qui y<br />

fixèrent après lui leur séjour, la paraphrase <strong>de</strong> cette idée<br />

que l'homme ne peut supporter plus longtemps le poids<br />

<strong>de</strong>s graves et luci<strong>de</strong>s pensées et cherche à retrouver ses<br />

joies perdues.

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