tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

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LA PROSE ET LES VERS
tin, si M. Paul André, déjà, ne l'avait fait, dans le précédent
fascicule de cette revue.
Dumont-Wilden, dans l'Expansion Belge de décembre, dit, en
parlant de cette étude sur Suarès ; " Il serait assez déplaisant de
voir un homme biographier, analyser un écrivain dans le seul dessein
de le démolir. Pourtant, une légère ironie ne messied pas; mais
elle est difficile à manier, et généralement mal comprise de celui
qui en est l'objet : la race irritable des poètes, dans tous les pays,
j'imagine, mais particulièrement en Belgique, n'aime pas le sourire,
même sympathique, du lecteur. M. Henry Dommartin, dans
son étude sur Suarès, ne sourit pas ».
C'est vrai que Suarès, d'ordinaire, impose. Il impose même
tellement qu'on se dispense de le connaître. On le déclare fort
élevé et peu accessible, et l'on ne s'aventure pas ! Quelle que soit
sa valeur, ceci est humiliant. Il est donc bon de l'étudier.
" Suarès, dit encore Dumont-Wilden, Suarès qui, d'ailleurs, a
écrit des pages admirables, est, pour une partie de la jeunesse
littéraire, une manière de prophète. Il en a la gravité, la solennité
les images éclatantes et la rhétorique. " — Je ne sais. Ecrire
pour la jeunesse, c'est un beau rôle. Disons que l'auteur de Cressida
est un auteur pour la jeunesse. Cela n'est pas mal...
*
* *
Cette étude de notre compatriote Henry Dommartin sur le Français
Suarès me fournit une agréable transition pour parler ici, bien
que cela ne soit point la coutume, d'un jeune écrivain français.
Et j'en parle en ami plutôt qu'en « critique », et cela vaut bien
mieux.
Par dessus la Haie, de Raoul Desjardins, est préfacé par Francis
Jammes. De cette préface, voici deux brefs passages :
« Les individus qui n'y voient pas s'appellent des aveugles, phrase
que je dédie à des littérateurs qui s'en réjouiront sans la comprendre.
Il est, en effet, des aveugles qui suppléent à la vision
par l'intelligence.
« Les aveugles dont je parle dédaignent ce qu'ils ne sont pas
capables de distinguer. Au contraire, certains jeunes hommes comme
vous, Raoul Desjardins, se souviennent, pour le plus grand
bien de leur talent, qu'il y a autre chose sur terre que des
arbres tondus comme des caniches »...
« Soyez loué, mon ami, pour la sensibilité qui, à vingt ans, vous
a permis un si joli début. Ce n'est pas au moment où votre énergie
vous a fait demander et obtenir un enrôlement dans l'armée colo-