tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

ARTHUR DE RUDDER 297
LES PEUPLES ET LA VIE
Comment on fait un opéra
On a parlé beaucoup de M. d'Annunzio en ces derniers
temps. On parle souvent de M. d'Annunzio en France et
en Italie. Il fut question du poète à propos de son Chèvrefeuille
représenté à Paris d'abord, en Italie ensuite sous
le nom de Ferro, à propos de Parisina joué avec un certain
succès sur la scène de la Scala, de Milan. Nous avons
déjà entretenu les lecteurs de cette revue de la légende
de Parisina que de récents travaux ont éclairée. Nous
n'y reviendrons pas. Mais un point de vue, celui du
compositeur Pietro Mascagni qui fut le collaborateur de
M. d'Annunzio, nous a paru curieux.
Une revue italienne la Lettura a interrogé l'auteur de
Cavalleria rusticana sur les origines de Parisina, et, de
très bonne grâce, M. Pietro Mascagni a répondu. Les
deux personnalités sont trop intéressantes pour qu'on ne
suive pas avec intérêt la genèse de la création d'une œuvre
aussi remarquable.
Un jour Mascagni fut interpellé dans là rue par l'éditeur
Sonzogno qui lui demanda à brûle-pourpoint, s'il
ne consentirait point à mettre en musique un livret de
d'Annunzio. Le musicien écouta la proposition qui ne
manqua pas de l'étonner d'ailleurs. Comment ! d'Annunzio
avait écrit un livret d'opéra ! A quel compositeur le destinait-il?
La vérité était que d'Annunzio n'y avait pas
songé. Le manuscrit portait sur sa couverture ces simples
mots : Parisina, tragédie lyrique de Gabriele d'Annunzio,
et quatorze points d'interrogations remplaçaient le nom encore
problématique du musicien. Il était très simple de les
remplacer par le nom de Pietro Mascagni.
Cependant Mascagni voulut avoir ses apaisements. Peutêtre
la pièce du poète ne répondait-elle pas à son tem-