tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

AUGUSTE VIERSET 43
« Ce qui nous anime en ce moment et nous ennoblit,
c'est la confuse conscience du devoir, de la vaste solidarité
que nous acceptons, avec les autres hommes, avec toute
la nature, c'est l'acceptation crâne et complète de notre
rôle humain. Il faut vivre, vois-tu, pour éprouver le plus
souvent possible cette bonne émotion. A elle seule, elle
compense toutes les peines éprouvées, toutes les bassesses
aperçues, elle vaut toutes les grandeurs artificielles et tous
les raffinements. Pour cela, la vie est bonne ; c'est parce
qu'il éprouve cela obscurément que ce gamin vagabond
courant dans la campagne et que la misère devrait écraser,
siffle un air de bravoure ; c'est parce qu'ils pressentent
cela au fond de leur instinct dont les bourgeons à
peine s'entr'ouvrent, que nos enfants chantent dans le jardin.
Chaque fois que l'homme peut se recueillir et appeler
ces sensations-là, il est le maître du bonheur. »
Telle est cette œuvre parfaitement ordonnée, d'une belle
tenue littéraire, toute imprégnée de tendresse émue, de
poésie et de bonté, d'une variété de tableaux et de détails
qui tranchent sur sa monochromie voulue, et dont la noblesse
de pensée et la haute portée morale font une sorte
de bréviaire du devoir et du bonheur.
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C'est dans ce champ du devoir où il moissonnera ses
meilleures récoltes, c'est parmi la floraison de nos obscurs
instincts que Vanzype glanera les sujets de son second
recueil de contes.
Parfois, comme dans le « Bonheur inquiet » il y reprend
une idée déjà émise ailleurs. Tel Fantin rougissant de
son bien-être devant les misères d'autrui, Jean éprouve
un étrange scrupule d'être heureux en présence des tristesses
voisines. Lui aussi « goûte la sereine jouissance de
se sentir un homme fort, d'avoir compris la vie dans la
simplicité des satisfactions qu'elle offre, d'avoir trouvé
de la fierté et de la joie dans la soumission aux élémentaires
obligations de travail, d'amour et de création qu'elle