tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

GUSTAVE VANZYPE
(SUITE)
Bien qu'il soit surtout, par tempérament, auteur dramatique,
Gustave Vanzype revient d'instinct au roman ou
au conte dès que le sujet prête moins aux péripéties et aux
« effets » qu'à un développement psychologique.
Claire Fantin est une jeune bourgeoise de situation modeste
que la perpétuelle obsession de la richesse rend malheureuse.
Elle s'irrite de la médiocrité de sa vie, des
mesquins détails de sa tâche de mère et de ménagère, de
son engourdissant bien-être, de la monotonie de sa petite
ville de province. Elle envie son amie de pension Hortense
Valin qui a de la fortune, un seul enfant, peut voyager,
vivre dans le luxe avec un mari charmant. Dans sa soif
d'inconnu, de mystère, de vivre ce qu'elle ignore, de
goûter à une saveur nouvelle, de connaître l'ivresse de l'abandon
dans la caresse des tissus soyeux, l'éclat moiré et
chaud des peluches et l'affolante griserie des parfums
épandus, elle a même failli un jour succomber à une pressante
attaque de Valin. Elle s'est ressaisie, en proie à un
dégoût profond. Mais il lui reste au cœur la détresse de
ne pouvoir espérer jamais les splendeurs qu'elle a entrevues,
les bonheurs qui lui sont interdits.
Elle a pour mari un ingénieur d'usine, d'une intelligence
vive, d'une énergie sereine et forte « noyée dans
l'expression de bonté claire qui transparaissait dans le
regard, se dégageait de toute l'attitude, du geste timide
et enveloppant à la fois, prêt toujours pour une caresse et
redoutant toujours de blesser, de causer une peine. » Il
sait, lui, que la vie est un tout sensible qu'il faut pren-