tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

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LES SALONS ET LES ATELIERS
tine. Chacun de 'ces Stevens a peur d'être pris pour un des autres.
Quant aux deux célèbres Stevens, qui ne sont plus de ce monde
— ce qui ferait cinq — on assure qu'ils ne sont pas contents non
plus.
Donc, Aimé Stevens a voyagé en Argentine et nous donne des
notes de voyage et des tableaux. Les perroquets, les fruits, la vie
exotique, les beaux enfants, quels régals de couleurs et de formes
pour un sensuel. Son grand tableau, appelé en Europe Fécondité,
et qui est tout simplement une impression de campo sud-américain,
paraît d'une composition arrangée; mais il est vrai de dire que
dans ces pays où la nature domine encore, les hommes et les femmes
savent se poser et se mouvoir. Ces argentins sont même coloristes
innés dans l'achat du chapeau, de l'écharpe, que sais-je !
Avec de tels éléments tout devient tableau.
Aimé Stevens est un artiste scrupuleux; il est de ceux qui ne se
soucient pas d'inventer une technique nouvelle, — et combien il a
raison, — appliquant plutôt son esprit à unir l'intérêt du sujet aux
charmes de la couleur. Parmi les tableaux peints chez nous, le Bal
est une brillante et fine petite œuvre, très séduisante; je citerai
pour la note d'intimité mère et enfant (n° 4); le portrait de Me S.
dont particulièrement la tête est d'un métier très beau; et la
jeune fille en bleu, toile d'une réussite heureuse sur toute sa surface;
et, enfin, Parmi les Coquelicots.
Jules Van de Leene.
Salle Studio (6-15 déc. 1913).
A en croire les œuvres de nos artistes, leurs âmes sont toute joie
et toute clarté. L'état d'âme est passé au second plan, la mode du
soleil est au premier. Le reproche que je ferai aux paysages de
Van de Leene, c'est leur excès de lumière. J'appelle excès de lumière
une lumière à qui tout est sacrifié, et qui prend le pas sur l'impression.
Certes, l'aptitude à l'impression ne fait pas défaut chez
Van de Leene, il en donne des preuves — en des aquarelles émues,
mais celles-ci datent de quelques années, à une époque où Van de
Leene n'était pas pris par la mode actuelle de faire clair, extra
clair, réaction généralisée du temps où l'on a fait noir, extra noir.
Il est, décidément, bien difficile d'écouter ses voix intérieures,
abstraction faite des emballements nés de son temps, de son milieu.
Il faudrait vivre dans le désert.
Les aquarelles de Van de Leene qui montrent le fond ému et
sensible de l'artiste sont de l'aquarelle pure, tel l'admirable ciel,
et par conséquent sont moins brillantes que celles de sa méthode