tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

PAUL ANDRE 79
autant les sympathies wallonnes de Georges que Lodewijck les blâme
et les raille.
Or Georges a laissé à Liége une petite amie qu'il aime de tout
son cœur et qui le lui rend bien : c'est Poyette, la rieuse et insouciante,
mais fidèle grisette, qu'il accourt rejoindre dès que, n'y
tenant plus dans son exil au morne plat pays de Flandre, il s'évade
de la maison paternelle, au grand scandale de Lodewijck, à la
vive colère de son père, à la profonde inquiétude navrée de sa
mère, à la joie complice de Violette.
Georges, Poyette et le vieux musicien s'installent dans une auberge
de campagne, des fenêtres de laquelle ils contemplent l'émouvant
horizon des plaines de la Fagne. Mais Violette sait
quelles souffrances le départ de Georges a créées. Il faut que la
séparation des deux jeunes gens se fasse. Lui-même, tout désespéré
qu'il en soit, la préparera.
La famille Troyen et l'insupportable Lodewijck sont en excursion
à Hockai. Ils découvrent Georges au moment même où celui-ci
apprend avec désespoir la fuite de Poyette'. La façon dont Troyen
traite en ce moment la douleur compréhensible de son fils et la
façon tendre dont sa mère entend au contraire le consoler, exaspèrent
le malentendu né entre ces époux aux sensibilités contradictoires.
La querelle surgie dans ce ménage depuis le jour où Lodewijck
d'une part, Violette et Georges de l'autre y ont semé la
graine des rivalités et des haines de race, atteint à son paroxysme.
Quand nous retrouvons, au 3° acte, la famille réunie à Gand,
nous assistons à ses déchirements. Troyen et sa femme ne se comprennent
plus comme ils le firent pendant vingt ans, et ne plus se
comprendre c'est bientôt ne plus s'aimer. Nous pouvons craindre
que cette mère et cette épouse jusque là irréprochable n'oublie son
devoir jusqu'à s'évader d'une maison qui lui est devenue odieuse.
Avec Georges, avec Violette, elle fuira, elle retournera à Liége,
parmi les siens, parmi la gaîté de sa ville vivante et joyeuse, au
pays du beau fleuve clair et des montagnes, et des bois et des
vallons admirables...
Mais tout cet irréparable ne s'accomplira pas. Georges oubliera
définitivement Poyette; Reine épousera son Camille. Troyen et sa
femme tomberont loyalement dans les bras l'un de l'autre. Il n'est
pas jusqu'à Lodewijck et Violette qui avaient été chassés du foyer
où leurs querelles jalouses avaient semé la discorde, qui ne rentreront,
réconciliés, tout le toit hospitalier.
Car tel fut le dessein de M. Davignon : montrer par cet exemple
pris dans notre vie quotidienne que la paix est possible, qu'elle est
nécessaire, mais qu'elle ne s'obtiendra que du jour, qui doit être