tome 34 (n°115-119) - de l'Université libre de Bruxelles

374 LES PEUPLES ET LA VIE
peut l'admettre. Il y a encore la grecque, c'est-à-dire
l'annexion du dodécanèse à la Grèce. Ce serait évidemment
la plus équitable, si l'on s'en tient aux raisons ethniques,
mais notre auteur s'empresse de trouver une raison
pour l'écarter. La Grèce n'est pas encore assez forte pour
pouvoir agir en dehors de son territoire. Il n'y a plus que la
solution italienne, celle qui a les préférences de M. Corradini.
Le vaisseau qui ramenait en Italie M. Enrico Corradini
l'a conduit au Pirée. De ce port à Athènes il n'y a que
huit kilomètres, et l'écrivain n'a pas hésité à les franchir. Il
a gravi la montagne sacrée qui domine la ville de Périclés
et il a accompli le pèlerinage à l'Acropole. M. Enrico Corradini
y éprouva le frisson coutumier de beauté, et nous ne
parlerions pas ici des idées qu'il exprime à ce sujet et qui
n'ont rien de particulièrement original, si nous nous souvenons
de la fameuse prière sur l'Acropole de Renan. Du
haut de la montagne il a vu Phalère, la péninsule de Munychie,
les îles d'Egine et de Salamine, toutes les gloires de
l'Attique et de la Grèce réunies dans un cercle de quelques
kilomètres, mais ce n'est pas cette vision qui fît sur son
esprit la plus forte impression. Il a entendu les paroles de
la cité, qui lui révélait le secret de ses triomphes. Jamais
peuple n'a, selon M. Enrico Corradini, eu en lui une plus
grande confiance que le peuple athénien. L'amour de soi
enivra Athènes, et prit bientôt une des formes les plus
hautes de l'art.
Les Perses d'Eschyle sont l'exemple le plus frappant de
cette foi dans la destinée. « Tout, nous dit l'écrivain,
fut athénien, depuis les fleuves jusqu'aux Dieux et à leur
culte. Athènes n'exista que par elle et c'est pour cette raison
qu'elle conquit le monde ». Et M. Corradini appuie
encore sur ce rapprochement : « Voilà, écrit-il, ce que
me dit Athènes, en cette année de notre guerre. Nous
autres italiens nous avons renouvelé dans notre cœur l'amour
de la patrie qui n'est que l'amour de nous-mêmes.
Nous devons le célébrer, le rendre sublime, le sanctifier à